Vengeance, Kinship Solidarity and Affinity in Late-Medieval and Early Modern France

L’historiographie traditionnelle, qui met en scène le triomphe inéluctable de l’État centralisateur sur une noblesse « incivile » et « incontrôlable », a largement négligé le phénomène omniprésent de la violence vindicatoire – la vendetta, la vengeance et la « faide » – dans la société française de l’époque moderne. En France, les rituels du duel ne canalisaient pas la violence. Au contraire, à partir de la fin du xvie siècle, il rendait les querelles traditionnelles plus sanglantes et plus difficiles a accommoder. Derrière le combat singulier entre deux individus, on trouve souvent la trace d’une longue et complexe histoire d’inimitié entre deux clans, ponctuée par des échanges violents et par de longues périodes de paix. Cet article dessine les méthodes et les moyens employés par un clan ou famille pour mobiliser ses membres soit pour se protéger soi-même ou ses biens soit pour tirer vengeance et réparer un honneur lésé. Le terme aƒƒinity désigne la totalité des relations qui liait une famille et ses partisans: on peut 1’imaginer comme une série de cercles concentriques. Au centre, il y avait le conseil et les commensaux, puis toutes sortes de clients et d’agents, et, aux marges, on trouvait des tenanciers et des vassaux. Le succès de la politique familiale dépend largement de la capacité de persuader ses adhérents à agir. D’une part, les liens entre un patron et ses clients sont particulièrement inconstants, d’autre part, il y avait une vaste réserve de soldats et de voyous, surtout pendant les guerres civiles, pour accomplir les basses besognes. La figure de l’arrogant laquais vêtu comme un dandy est devenue un stéréotype de l’époque moderne, mais, en fait, l’essor de ce phénomène montre que même au milieu du xviie siècle, il fallait mettre l’honneur des adversaires à l’épreuve continuellement en leur adressant des bravades et des injures