Influence des métabolites secondaires de plantes sur la sélection alimentaire du campagnol des champs (Microtus pennsylvanicus)

Les résultats obtenus et la littérature disponible sur le Campagnol des champs (Microtus pennsylvanicus ) ont permis d'évaluer les fondements des hypothèses protoxines. Nous présentons des arguments qui vont à l'encontre des hypothèses anti-herbivores quant à la distribution prévue des divers types de métabolites secondaires (M. S.) entre les ressources abondantes et rares des habitats. Les hypothèses protoxines récentes suggèrent que l'ingestion de plantes renfermant des M. S. est à l'origine des fluctuations cycliques de microtinés. Ces hypothèses demeureront pertinentes s'il est possible de montrer que la présence ou l'absence de ces substances dans les ressources peuvent influencer le comportement alimentaire des herbivores sans considération de la disponibilité des plantes dans l'habitat. Nous avons donc étudié la sélection alimentaire du Campagnol des champs en relation avec la présence de M. S. dans les plantes abondantes de trois prairies de différentes étapes de succession écologique. Des espèces végétales abondantes renfermant des M. S. ont été rejetées de l'alimentation tel que le prédisait les hypothèses protoxines. Les campagnols ont toutefois montré une préférence soutenue envers une plante avec M. S. quelle soit abondante ou rare dans l'habitat. De plus, certaines plantes abondantes dépourvues de ces substances ont quand même fait l'objet de rejets systématiques de la part des rongeurs. Les patrons d'utilisation des espèces végétales avec M. S. reflètent aussi bien des rejets et préférences particulières indépendamment de leur accessibilité. Nous concluons que les M. S. des plantes n'agissent pas invariablement comme facteur de dissuasion dans le choix des composantes de l'alimentation du Campagnol des champs et que les rejets ne sont pas toujours reliés à la présence de ces substances dans les espèces végétales. Nous discutons de nos résultats en rapport avec un modèle de sélection alimentaire dérivé des théories de quête optimale de nourriture faisant intervenir simultanément le rôle des propriétés nutritives et défensives des plantes. Ce modèle semble à l'heure actuelle fournir l'avenue la plus réaliste dans l'explication des facteurs pouvant régir les comportements alimentaires d'herbivores et permet ainsi de mieux cerner le rôle de l'écologie de la nutrition dans la dynamique de population