Maylis de Kerangal: l'écriture et le réel

Maylis de Kerangal: the writing and the real From Corniche Kennedy, the literary horizon of Maylis de Kerangal has been enlarged by giving us the opportunity to read the intimate and collective adventure of a true human epic with a writing in direct contact with the real. But what are the relations between reality and fiction in the work of M. de Kerangal? Seeking to identify the subjective impasses of present-day society, while extracting new forms of self-construction from the other, his writing seems to unite in a single movement reality and fiction to tell the world. The real that emerges from the texts of M. de Kerangal is a real "created", "worked", the real of fiction, in the context of a writing at the same time precise (by the exploration of all the proper lexical fields To each subject) and fast, spreading over the page and crossing the present with a lucid look at the complexity of human relationships. Seized in the energy of the movement, the emotions felt by the characters turn out to be tensions which, from pleasure to suffering, are often experienced in the flesh, and eventually surpass it, confronting itself with matter and seeking to Transform or capture the energy it releases. Nurtured by meticulous information about the real, his sentences describe a flow, both corporeal and mental, by means of a multiple, palpitating and just writing that evolves in the course of his novels, notably from Corniche Kennedy to Réparer les vivants, through Naissance d’un pont. Thus, in the context of the current novel, which has become « protéiforme, polymorphe, transformiste, omnivore », as the writer noted in his intervention in the collective Devenirs du roman (Inculte, 2007), while diving into the heart of the human condition, M. de Kerangal's writing becomes the place of observation and discussion around the act of writing, as well as a tool for reflection on some features of contemporary prose.Maylis de Kerangal : l’écriture et le réel Depuis Corniche Kennedy l’horizon littéraire de Maylis de Kerangal s’est s’élargi en nous donnant à lire l’aventure à la fois intime et collective d’une véritable épopée humaine avec une écriture en prise directe avec le réel. Mais, quels rapports entretiennent-ils le réel et la fiction dans l’œuvre de M. de Kerangal ? Cherchant à cerner les impasses subjectives de la société actuelle, tout en extrayant de nouvelles formes de construction de soi et de l’autre, son écriture semble réunir en un seul mouvement réalité et fiction pour dire le monde. Le réel qui émerge des textes de M. de Kerangal est un réel « créé », « travaillé », le réel de la fiction, dans le contexte d’une écriture à la fois précise (par l’exploration de tous les champs lexicaux propres à chaque sujet) et rapide, qui s’étale sur la page et traverse le présent avec un regard lucide sur la complexité des rapports humains. Saisies dans l’énergie du mouvement, les émotions ressenties par les personnages s’avèrent des tensions qui, du plaisir à la souffrance, s’expérimentent souvent dans la chair, et finissent par la dépasser, se confrontant à la matière et cherchant à la transformer ou à capter l’énergie qu’elle dégage. Nourries par une information minutieuse du réel, ses phrases décrivent une coulée, à la fois corporelle et mentale, au moyen d’une écriture démultipliée, palpitante et juste, qui évolue au fil de ses romans, notamment de Corniche Kennedy à Réparer les vivants, en passant par Naissance d’un pont. Ainsi, dans le cadre du roman actuel, devenu « protéiforme, polymorphe, transformiste, omnivore », tel que l’écrivaine le remarquait dans son intervention dans le collectif Devenirs du roman (Inculte, 2007), tout en plongeant au cœur de la condition humaine, l’écriture de M. de Kerangal se fait lieu de l’observation et de la discussion autour de l’acte d’écrire, ainsi qu’un outil de réflexion sur quelques traits de la prose de l’extrême contemporain