Procréation, corps, sciences et techniques au XXe siècle

Cet article propose une lecture des transformations ayant affecté le corps des femmes et, en particulier des femmes gestantes, au cours du XXe siècle. Il s'agit de pointer les tendances de longs termes à l'œuvre et le rôle des technologies biomédicales dans la redéfinition des possibles en matière de reproduction humaine. Les liens entre procréation, science et politique sont mis en évidence pour la période de l'entre deux guerres (natalisme, eugénisme) et celle de la guerre froide (birth control, explosion démographique). L'article tente de donner une profondeur historique qui permette de nuancer les récits toujours très positifs à propos de l'ère contemporaine en rappelant la diversité des agendas politiques de ces pratiques scientifiques. A partir des travaux micro sociologiques sur les pratiques médicales contemporaines, il souligne la variété des usages sociaux des techniques de reproduction ainsi que des interprétations sociales et politiques qu'il est possible d'en donner. Essayant de mesurer les aspects émancipateurs et contraignants des technologies biomédicales actuelles pour les femmes, il s'interroge sur la possibilité d'une appropriation plus ferme par les actrices des scénarios médicaux existants. L'auteur suggère, suivant en cela les propositions de Donna Haraway, que c'est en multipliant les récits sur les ‘façons de faire' avec les technologies médicales qu'il est possible de contribuer à la définition de ressources collectives en vue d'agencements plus satisfaisants