La fin des avant-gardes: les situationnistes et Mai 68

What emerges first and foremost from debord's writings in 1968 is that the situationists' initial reaction to the May “events” was to interpret them as the first example of a spontaneous general strike in the context of what he called “overdeveloped capitalism”. Debord's position on this question is linked to his questioning of the status of the avant-gardes. at the time, Debord and those close to him sought both to conceptualise and to enact the end of the avant-gardes. And this included the Internationale Situationniste in its status as political, philosophical and artistic avant-garde. The article subsequently sets out to show that if the situationists did have any leverage on the events of May, it was insofar as they practised a maverick Marxism centred on the concept of alienation. This enabled them to conceptualise both the exploitation of the wage-earner and the condition of the consumer. Because they represent a comprehensive critique of capitalism and because, furthermore, they refuse to compromise on the revolutionary and worker dimension of the May-June 1968 moment, Debord's writings of the period enable us to grasp what, in the strict sense, remains beyond any opportunistic recuperation in these events.De même que mai 68 a souvent été réduit à sa composante étudiante, de même il a longtemps été de bon ton de réduire l'activité des situationnistes à une sorte de critique artiste de la vie quotidienne, au motif qu'ils refusaient la séparation de l'art, de la philosophie et de la politique. Or ce que démontrent en premier lieu les textes écrits par Debord autour de 1968, c'est que les situationnistes ont d'abord vu dans les « événements » la première grève générale spontanée, intervenue dans les conditions de ce qu'il nomme le « capitalisme surdéveloppé ». Cette prise de position est associée à une réflexion sur le statut des avant-gardes : critiques envers les appareils bureaucratiques (PCF, CGT), tout autant qu'envers ce qu'ils considèrent comme les embryons de leur renouvellement (les groupes gauchistes), Debord et ses amis tentent de penser et de mettre en pratique la fin des avant-gardes – ce qui inclut l'Internationale Situationniste comme avant-garde politique, philosophique et artistique. En second lieu, cet article vise à montrer que si les situationnistes ont eu prise sur l'événement, c'est en tant qu'ils ont pratiqué un marxisme détourné, centré sur le concept d'aliénation, qui permet de penser aussi bien l'exploitation du salarié que la condition du consommateur. Parce qu'ils représentent une critique totale du capitalisme, parce qu'ils refusent aussi de transiger sur le caractère révolutionnaire et ouvrier du soulèvement de mai-juin 1968, les textes de Debord donnent à voir ce qu'il y a de proprement irrécupérable dans ces événements