L’émancipation coopérative face à la compétence participative

International audienceL’idéalisation des dispositifs participatifs est toujours allée de pair avec un soupçon sur leur capacité à influer sur la décision . En effet, il ne peut s’agir que de rituels tronqués, puisque l’institution organise ces épreuves et tranche face au continu délibératif. Entre un “consentement négatif” suspicieux et une dynamique militante incertaine, les gouvernés sont-ils alors condamnés à s’intégrer dans ces dispositifs ambigus ?Dominés ordinaires, des locataires d’HLM ont bénéficié d’une accession sociale à la propriété dans le cadre d’une opération d’éradication de l’insalubrité située dans un quartier populaire. Contre toute attente, ils se sont dotés d’une gestion coopérative afin de mieux maitriser leur devenir de propriétaires lourdement endettés et à faibles revenus. Pourtant, ils ont dû intenter une action en justice contre la Société d’Economie Mixte et l’entreprise, en raison de la mauvaise réalisation du bâtiment commandité par les pouvoirs publics. Suite à cette première mise à l’épreuve, ils sont intervenus au sein et à l’extérieur du Conseil de Quartier pour remettre en cause publiquement certaines décisions de la collectivité locale, gouvernant au nom d’une “efficience participative” issue d’un travail critique d’experts en sciences sociales. Face à ces deux types de domination , les copropriétaires ont qualifié et donc attribué une valeur publique aux situations socio-spatiales domestiques qu’ils rencontraient pour proposer une réalité concurrente aux récits déployés par les institutions. Dans le même temps, ce collectif a su publiciser la singularité des souffrances individuelles produites par les processus de domination qui étaient à l’œuvre. Cependant, c’est parce que le projet urbain et l’accession sociale à la propriété relevaient de politiques institutionnelles, que la constitution d’un véritable public a été possible. Cela a en effet facilité la mobilisation des uns et des autres pour une cause légitime, malgré la pluralité des motifs ou des intentions poursuivies par chacun. De fait, cet objet urbain est devenu pour tous un “ressort moral du travail politique” . Les accédants ont dû par exemple, dénier tout comportement NIMBY pour légitimer leur action auprès de la collectivité, mais ce travail d’émancipation des copropriétaires vis-à-vis de leur nouvelle condition interroge également les contradictions de l’institution qui a fondé la réussite de son projet sur la coveillance exercée par ces nouveaux habitants. Cette communication serait ainsi l’occasion d’expliciter comment l’articulation entre projet public et mobilisation coopérative met à nu certains pouvoirs, capacités et incapacités caractéristiques de l’action publique participative. Dès lors, cet agencement pourrait constituer une piste fructueuse pour les transformer