L'expérimentation du geste martial et du geste artistique: regards croisés

Notre communication a pour objectif principal de comparer les problématiques de recherche de nos domaines d’études respectifs, en particulier leurs méthodes et leurs approches expérimentales. En effet, l’inscription (ou la codification) gestuelle des arts de guerre et des arts de grâce se heurte à un certain nombre d’obstacles communs et sa lecture pose aux chercheurs des problèmes similaires. D’ailleurs, même si nos corpus de recherche sont éloignés de plusieurs siècles, les arts de la danse et du combat évoluent quant à eux parallèlement à partir de la Renaissance en tant qu’art " mécanique". Remises en contexte (quelles sources, quelles problématiques particulières), nous présenterons nos démarches, montrant les analogies et les différences propres aux méthodes qui en découlent. Une attention particulière sera accordée aux questions méthodologiques liées à l’expérimentation gestuelle. Saisir les tenants et les aboutissants de cette approche devient à notre avis essentiel lorsqu’il s’agit de l’inclure dans une démarche pluridisciplinaire d’étude, et de lui donner une crédibilité scientifique. Nous illustrerons nos propos par deux exemples pratiques. Le premier concernera les arts de guerre à partir d’un groupe de manuscrits issus de la première moitié du XVe siècle, dénommés "Gladiatoria". Un ensemble de gestes de combat en armure codifiés seront analysés selon un protocole visant à réduire les abstractions textuelles et les problèmes de terminologie ainsi que les problèmes d’identification entre texte et images. Le second traitera des arts de grâce, et présentera la partition chorégraphique en notation Feuillet dénommée "l’Entrée de l’Amiral de France" (1756), dont il existe également une description. L’analyse qui en sera proposée montrera l’apport et les limites de l’expérimentation pour élaborer des hypothèses interprétatives, d’abord pour résoudre des problèmes plus ponctuels difficilement réductibles par l’étude "à la table", puis pour la danse en général. A partir de ces deux exemples concrets, nous pourrons apprécier non seulement les apports de l’expérimentation pour l’étude de nos sources respectives, mais surtout l’approche expérimentale elle-même. L’analyse des objectifs, des critères de validation et d’évaluation, des problèmes et des limites rencontrées pour les recherches concernant nos propres domaines d’études prendra la forme d’une comparaison des résultats des démarches appliquées à nos exemples. Nous déboucherons sur des réflexions à propos de la place qu’ont ou n’ont pas la méthode expérimentale et les questionnements qui en découlent. Nous pensons à plusieurs exemples, objets ou résultats de la recherche en sciences humaines, pour lesquels cette place reste à définir