Normes de genre et bicatégorisation : quelle reconnaissance pour l'intersexuation ?

Nous nous proposons, dans cette communication, d’examiner l’intersexuation dans une perspective croisée, mobilisant des éléments de définition biologiques, des instruments juridiques et des ressources philosophiques, afin de nourrir des débats d’une indéniable complexité sociale. Dans un premier temps, nous étudions l’intersexuation à la lumière de la notion de norme, envisagée dans toute son ambivalence, à la fois comme normalité et comme normativité, et nous mettons en évidence la façon dont le pouvoir produit et institue normativement les sexes masculins et féminins sur la base d’un ensemble d’exclusions constitutives (G. Canguilhem, M. Foucault, J. Butler). Dans un second temps, nous apportons une réponse critique et éthique à la violence de cet appareil normatif en appréhendant le statut « hors norme » des personnes intersexuées à l’aune des théories de la reconnaissance (J. Butler, A. Honneth). L’examen de ce que Honneth identifie comme des expériences de « mépris » (violence corporelle, privation juridique et offense sociale), qui sont autant d’obstacles à l’intégrité personnelle et au rapport positif à soi dans les trois sphères de la sollicitude, du droit et de la solidarité, nous permet ainsi d’avancer un critère d’appréciation qui justifie la critique du pouvoir et soutient en même temps la reconnaissance des sujets intersexués