Les péages de Pizançon et Charmagnieu : l'exemple d'une fiscalité fluviale aux XVIIe et XVIIIe siècles

Les travaux consacrés à l'étude historique des péages sont peu nombreux. La première représentation que l'on s'en fait, fiscale et comptable, en est probablement la cause. Mais, au-delà d'une apparence assez ingrate, les archives des péages se révèlent être de précieux indicateurs sur l'activité commerciale et économique, que ce soit à l'échelle de la province ou du royaume. L'étude des péages de Pizançon et Charmagnieu, tous deux situés sur l'Isère à proximité de la ville de Romans, permet tout d'abord d'apercevoir l'importance du cours d'eau sur l'organisation de l'espace humain à l'échelle de la province du Dauphiné. Par sa capacité de transport, l'Isère polarise à sa proximité les sites de production métallurgique et d'exploitation forestière. Elle favorise ainsi les échanges entre le Dauphiné, la Savoie et une partie du royaume. Bien que lacunaires et peu détaillés, les comptes journaliers des péages révèlent que le développement économique de la province est progressivement orienté vers la fourniture des armées et des commandes royales à partir du milieu du XVIIe siècle. Ces documents montrent aussi, une augmentation de l'espace commercial des échanges à l'exportation à cette même période. Les sources péagères renseignent également sur la nature et la quantité des marchandises transportées par voies d'eau et permettent de définir la pression fiscale exercée sur certaines d'entre elles. Elles apportent également des connaissances sur la gestion du péage, le coût de celle-ci et montrent l'existence de tensions ponctuelles entre le propriétaire des droits et le fermier qui les perçoit. Enfin, la réflexion amenée par l'étude de ce péage semble révéler qu'au-delà des décisions politiques et des phénomènes proprement économiques, la disparition progressive des péages est d'abord due au développement d'une nouvelle échelle de l'espace humain qui rend inadaptées ces créations dont la conception et la portée sont essentiellement locales