Les Géorgiques de Virgile et le tragique (Virgile, Géorg, III, 139-142 et Ennius, Se, 76-77 Vahlen)

The paper concerns a passage of Virgil's Georgics which seems to allude in a less than reverent way to the prophecy about the entrance of the wooden horse into Troy uttered in a famous scene of Ennius'tragedy, the Alexander. It is argued that the skill of a tragic poet and his actors and dancers in making plausible a factually untrue story was in Antiquity admired at least as much as any doctrine about humanity, its place in the world and its obligations which his tragedy may have presented ; that Virgil's desire to convey accurate and useful information about matters of practical importance with as much dignity and charm as the old epic and tragic poets had displayed in dressing up their falsehoods brought problems, particularly where the use of markedly poetical stylemes was concerned, and led to the further development of a style of hexameter poetry quite distinct from that of Ennius1 Annals on the one hand and that of Lucilius' Satires on the other ; and that allusions in the Georgics to earlier poems of high generic status had of necessity to function differently from those which would be made in the same poet's Aeneid, a poem which set out to make plausible a story which cultivated persons knew to be untrue. While the allusions to the Ennian Cassandra's vision of a pregnant mare leaping over the wall of Troy at Aen. II, 18-20, 234-238, 258-264, 328- 329 ; VI, 515-519 took advantage of the success of the Alexander in representing Priam and the leading members of his family and enforced the heroic poem's condemnation of their failure to heed divine warnings, the one at Georg. Ill, 139-142 set to one side the question of the truth of the story of the house of Priam and helped the didactic poem's reader to fathom one of the many oddities and difficulties of its verbal style.Cet essai concerne un passage des Géorgiques de Virgile qui semble faire allusion d'une façon peu révérencieuse à la prophétie de l'entrée du cheval de bois dans Troie, prononcée dans une scène très connue de la tragédie d'Ennius, l'Alexander. Je tente de démontrer que l'habileté d'un poète tragique, de ses acteurs et de ses danseurs, à rendre plausible une histoire qui n'était pas véridique, était, dans l'Antiquité, admirée du moins autant que toute doctrine sur l'humanité, sa place dans le monde et ses obligations, éventuellement présentée par lui ; que le désir de Virgile de transmettre des informations utiles sur des sujets d'intérêt pratique avec autant de dignité et de charme dont les anciens poètes épiques et tragiques avaient fait preuve en déguisant leurs mensonges créait des difficultés, surtout en ce qui concerne l'emploi de systèmes sensiblement poétiques, et menait au développement plus poussé d'un style de poésie hexamétrique bien différent de celui, d'un côté, des Annales d'Ennius et, d'un autre, des Satires de Lucilius ; et que les allusions dans les Géorgiques à des poèmes antérieurs de statut générique élevé devaient par nécessité fonctionner différemment de celles qui seraient faites dans l'Enéide, un poème dont l'objet était de rendre plausible une histoire dont les gens cultivés savaient qu'elle n'était pas véridique. Tandis que les allusions à la vision de la Cassandre d'Ennius d'une jument pleine sautant le mur de Troie dans En. II, 18-20, 234-238, 258-264, 328-329 ; VI, 515-519 tiraient avantage de la représentation réussie de Priam et les membres les plus importants de sa famille dans l'Alexander, et soulignaient la condamnation par le poème épique de leur négligence face aux avertissements divins, l'allusion à Géorg. III, 139-142 mettait de côté le problème de la véracité de l'histoire de Priam et sa famille, et aidait le lecteur du poème didactique à pénétrer une des nombreuses bizarreries et difficultés de son style verbal.Jocelyn Henry David. Les Géorgiques de Virgile et le tragique (Virgile, Géorg, III, 139-142 et Ennius, Se, 76-77 Vahlen). In: Pallas, 49/1998. Rome et le tragique, sous la direction de Marie-Hélène Garelli-François. pp. 297-321