En amont de l’indo-européen : les enseignements eurasiatiques de J. Greenberg et de quelques vieux hydronymes

Michel Lejeune’s disciples were all deeply marked by his unrelenting scientific rigour. One should always bear in mind the fundamental principles it is rooted in if one wants to broach the complex problems posed by the origins of Indo-European. After briefly summarizing the extant research that has been launched into in this field for a century now which led to putting forward various hypotheses (Nostratic, Eurasiatic), we will question the relevance of some specific methodological rules exposed in a brief survey. This liminary presentation will lead us onto an analysis of J. Greenberg’s morphological teaching of Eurasiatic. This analysis results in the selection of three relevant examples i.e. three elements our demonstration will endeavour to present as fixed realities through a thorough examination. Concerning the lexicon of the macrofamily, J. Greenberg’s analyses prove somewhat disappointing owing to a insufficient number of clearly rebuilt etymons, which leads us to explore the problem of such scarcity. Old hydronyms are resorted to for the exploration. While providing further material for information having different origins, this language used for rivers enables us to put forward the hypothesis – which is compatible with the present data about the genetics of populations and migrations – of the reality of a huge macrofamily defined as greater Nostratic or Afro-Euro-Asiatic. This theory, which should be broached with the rigorous methodology referred to above, seems to imply that before such different families as Indo-European emerged, a linguistic protosystem based on varied and complex affixation disintegrated. The extensive lexical and morpho-syntactic renewal that consequently seems to have stemmed from this may partly account for the actual incapacity, at this stage of diachrony, of the current methods used for etymology reconstruction.Tous les disciples de Michel Lejeune ont été profondément marqués par son intransigeante exigence de rigueur scientifique. On ne doit en aucun cas se départir des principes fondamentaux sur lesquels elle repose lorsque l’on s’intéresse aux redoutables problèmes que pose l’origine de l’indo-européen. Après un bref rappel d’un siècle de recherches dans ce domaine, qui ont abouti à différentes hypothèses (le nostratique, l’eurasiatique), on s’interroge sur la pertinence de quelques règles méthodologiques particulières, dont un bref exposé est présenté. Sur cette base est alors proposée une analyse de l’enseignement morphologique de J. Greenberg sur l’eurasiatique. Elle conduit à sélectionner comme exemples pertinents trois éléments dont on tente de montrer qu’ils constituent des acquis réels. On en approfondit l’examen. Sur le lexique de la macrofamille, les études de J. Greenberg se révèlent décevantes, faute d’étymons clairement reconstruits, ce qui invite à essayer de comprendre pourquoi sur ce point la matière disponible est si pauvre. On recourt à l’apport de vieux hydronymes. Complétant des informations ayant d’autres origines, cette « langue des cours d’eau » conduit à poser l’hypothèse de l’existence, compatible avec les données actuelles de la génétique des populations et des migrations, d’une immense macrofamille que l’on appelle grand nostratique ou afro-euro-asiatique. Cette théorie, qu’il convient d’explorer sans se départir de la rigueur que l’on a évoquée, impliquerait, avant l’apparition des différentes familles telles que l’indoeuropéen, l’effondrement d’un proto-système linguistique fondé sur une affixation complexe et multiforme. C’est par l’immense renouvellement lexical et morphosyntaxique qui en aurait été la conséquence que pourrait s’expliquer l’impuissance réelle, à ce niveau de la diachronie, des méthodes courantes de la reconstruction étymologique.Levet Jean-Pierre. En amont de l’indo-européen : les enseignements eurasiatiques de J. Greenberg et de quelques vieux hydronymes. In: Autour de Michel Lejeune. Actes des journées d'études organisées à l'Université Lumière Lyon 2 – Maison de l'Orient et de la Méditerranée, 2-3 février 2006. Lyon : Maison de l'Orient et de la Méditerranée Jean Pouilloux, 2009. pp. 195-214. (Collection de la Maison de l'Orient méditerranéen ancien. Série philologique, 43