La romanisation de l'architecture grecque : le cas du temple à Cyrène

Résumé : Quelle est la part de l'innovation romaine dans l'architecture religieuse d'une ancienne cité grecque durant le Haut-Empire? Le cas de Cyrène montre qu'hellénisme et romanité sont souvent conjoints: la majorité des temples conserve des procédés de construction grecs, mais une grande partie des bâtiments neufs ou restaurés à cette époque recouvrent des types romains tels que le temple prostyle sur podium à escalier de façade, les temples géminés ou le temple à cella barlongue. La façon dont ces temples sont composés avec d'autres types d'édifices peut également être romaine, comme le forum de Cyrène qui associe un quadriportique à un temple et une basilique, mais ce cas de romanisation reste rare en Cyrénaïque. Ll apparaît que le conservatisme des façons de construire s'explique essentiellement par une inertie du savoir-faire où les artisans et architectes en Cyrénaïque reproduisent simplement leurs habitudes en utilisant le système technique qu'ils connaissent déjà. Ce n'est pas dans le contexte historique qu'on trouvera ici des explications aux innovations romaines dans le temple cyrénéen : la religion reste très ancrée dans la tradition régionale, la population romaine y a toujours été minoritaire, et l'identité des dédicataires ou l'origine des financements ne coïncident pas forcément avec le style des temples concernés par ces nouveautés. L 'exemple cyrénéen est ainsi démonstratif d'une réalité dont il faut tenir compte dans des situations documentaires moins confortables : on ne peut systématiquement associer au faciès stylistique d'une production artistique la présence d'individus, d'institutions ou d'usages sociaux ayant une même origine géo-chronologique.Marlier Thomas. La romanisation de l'architecture grecque : le cas du temple à Cyrène. In: Lieux de cultes : aires votives, temples, églises, mosquées. IXe Colloque international sur l’histoire et l’archéologie de l’Afrique du Nord antique et médiévale (Tripoli, 19-25 février 2005) Préface de Jean-Luc Sibiude, ambassadeur de France en Libye. Paris : Éditions du Centre National de la Recherche Scientifique, 2008. pp. 61-71. (Études d'antiquités africaines