La plateformisation de l'information : les relations des éditeurs avec les plateformes de messagerie et l'adoption de ces outils pour la distribution des nouvelles et l'engagement du public

Under the framework of political economy and considering the multidimensional process of the platformization of the Internet, this research seeks to understand the relationships between news publishers and digital platforms such as Google and Facebook and how they influence news organizations' adoption of messaging applications such as WhatsApp, Messenger and Telegram for news distribution and audience engagement in the aftermath of Facebook's algorithmic changes implemented between the end of 2016 and the beginning of 2018, which caused publishers to lose the connection with parts of their audiences and the migration of part of the news consumption to other platforms such as messaging applications. This study employed a qualitative dominant mixed method research (multiple case studies with the collection of documents and observations, expert interviews with editors and executives of news organizations in Brazil, Chile, Guatemala, Mexico, Spain and France, and quantitative content analysis of messages sent by publishers on WhatsApp and Telegram) to find that publishers' dissatisfaction with Facebook has spilled over news organizations' relationships with messaging applications, affecting the adoption of WhatsApp, the leading chat app in the countries addressed. Facebook's contingent policies and WhatsApp's structural and technical limitations to news work function as barriers for the wide adoption of this tool by publishers, forcing them to stay away or even deplatform. Messaging apps' affordances such as efficiency and reaching audiences, national contexts (e.g., the ubiquity of WhatsApp in Brazil), and specific characteristics of some news organizations such as their focus on local news or fact-checking are reasons for publishers' insistence on maintaining a presence on the platform. Although partnerships with fact-checkers show a limited approach from Meta/WhatsApp to deal with disinformation, focused mostly on countering rumors and not on the larger circulation of information from credible news sources, they also seem unique in the larger panorama of platform-publisher relationships: instead of targeting only well-established partners like Google and Facebook have originally done every time they released new features, WhatsApp also looked to newly founded, independent, and growing initiatives (i.e., fact-checking news startups). Although beneficial at first, these news initiatives create considerable dependencies on the messaging app not only in terms of news organizations' connection to their audiences but also financial as WhatsApp had already become one of the main sources of revenue for fact-checking organizations: sudden changes to the platform's policies could affect news practices on the chat app and have drastic consequences to their sustainability. This study also finds that specific aspects of news consumption on messaging applications such as 'news snacking' (i.e., several short checks of messages throughout the day) shape the content sent by news organizations on chat apps, but, in comparison to open social media, publishers also enjoy larger autonomy to define news subjects that get distributed in accordance with their own journalistic criteria. Research carried out after the changes implemented by Facebook claimed that news outlets have sought to increasingly use news content as a bait to eventually convert readers into subscribers or paying members. This study notes the limited use of this type of strategy in the realm of messaging applications, despite publishers' increasing 'product orientation', which is reflected in the emergence of new editorial functions and staff positions connected to the business side of the companies.Mobilisant le cadre conceptuel de l'économie politique et s'inscrivant dans le processus multidimensionnel de la plateformisation d'Internet, cette recherche cherche à analyser les relations entre les médias et les plateformes numériques telles que Google et Facebook. L'objectif est de comprendre de quelle manière elles influencent l'adoption par les organes de presse d'applications de messagerie telles que WhatsApp, Messenger et Telegram pour la distribution d'informations et l'engagement du public. Durant la majeure partie des années 2010, tous les médias sont devenus de plus en plus dépendants des plateformes pour atteindre leurs audiences, recourant même à la publication native de contenus directement sur les serveurs de ces intermédiaires sous prétexte d'améliorer l'expérience utilisateur et d'"optimiser" la sélection de contenus alimentés par leurs algorithmes. Les éditeurs espéraient qu'à terme, des audiences plus larges et des relations plus étroites avec les plateformes pourraient entraîner une augmentation de leurs revenus publicitaires, en baisse depuis des années. Ces attentes ont été largement déçues par les changements d'algorithmes mis en place par Facebook entre fin 2016 et début 2018, qui ont fait perdre aux médias le lien avec une partie de leur audience et la migration d'une partie de la consommation d'actualités vers d'autres plateformes telles que les applications de messagerie. Cette étude a mobilisé une méthode mixte à dominante qualitative (études de cas multiples avec la collecte de documents et d'observations, entretiens d'experts avec des rédacteurs en chef et des dirigeants d'organisations de presse au Brésil, au Chili, au Guatemala, au Mexique, en Espagne et en France, et analyse quantitative du contenu des messages envoyés par les éditeurs sur WhatsApp et Telegram) pour constater que le mécontentement des éditeurs à l'égard de Facebook s'est étendu aux relations des organes de presse avec les applications de messagerie, affectant ainsi l'adoption de WhatsApp, la principale application de chat dans les pays concernés. La politique de Facebook et les limitations structurelles et techniques de WhatsApp quant à la transmission d'informations liées à l'actualité sont citées comme les principales raisons des opinions négatives des éditeurs sur l'utilisation de l'outil pour la distribution de contenu et l'engagement du public. Les possibilités des applications de messagerie telles que l'efficacité et l'importance des audiences, les contextes nationaux (par exemple, l'omniprésence de WhatsApp au Brésil) et les caractéristiques spécifiques de certaines organisations de presse telles que leur concentration sur les informations locales ou la vérification des faits sont les explications principales quant à la volonté de certains éditeurs de maintenir une présence sur la plateforme. Cette étude révèle également que des aspects spécifiques de la consommation d'actualités sur les applications de messagerie telles que le "grignotage d'actualités" (c'est-à-dire une succession de brèves vérifications de messages tout au long de la journée) façonnent le contenu envoyé par les organes de presse sur les applications de chat, mais, par rapport aux médias sociaux ouverts, les éditeurs jouissent également d'une plus grande autonomie pour définir les sujets d'actualité qui seront diffusés selon leurs propres critères journalistiques. Les recherches menées après les changements mis en œuvre par Facebook ont affirmé que les organes de presse ont cherché à utiliser de plus en plus le contenu des actualités comme appât pour éventuellement convertir les lecteurs en abonnés ou en membres payants. Cette étude constate la faible utilisation de ce type de stratégie dans le domaine des applications de messagerie, malgré une "orientation produit" croissante des éditeurs, qui se traduit par l'émergence de nouvelles fonctions éditoriales et postes de personnel liés au business des entreprises