Le Projet français de banque d'État du Maroc, 1889-1906

Morocco went through such a serious monetary and financial crisis at the end of the 19th century that the only possible cure seemed to lie in the creation of a State Bank capable of straightening out the situation and giving the government the necessary means for reform. This idea, expressed by businessmen since 1883, obtained the approbation of the Banque de Paris et des Pays-Bas in 1901. In 1903, Delcassé and Saint-René Taillandier, French minister in Tangiers, saw in it the key to the future protectorate and came to a general agreement with a consortium of French banks led by the Banque de Paris et des Pays-Bas at the very moment when, in desperation, the Moroccan Government obtained a positive answer to their request for a new French loan (June 1904). France's diplomatic position in Morocco was now exeptionally strong : in one agreement after another, Delcassé had obtained the withdrawal of Italy, England and Spain ; he believed the time had come to present the Maghzen with a vast programme of reforms where the creation of a State Bank was well in evidence. It would hâve the monopoly for the minting and issuing of currency, cash and treasury, loans and credit. While elaborating the statutes of the new bank, Regnault, the father of the project, tried to obtain from Paribas the guarantee of French Government control over the contemplated Moroccan State Bank. The agreement had not yet been reached when Saint-René went to Fez in 1905 to start negociations. But Germany raised a diplomatic crisis, leaving the solution to fall back on an international conference. The Algesiras Act (1906) gave birth to a Moroccan State Bank, which, though international by its capital and its members, secured France with a privileged position, fulfilling for a great part the aims of its founder.Le Maroc, à la fin du XIXe siècle traverse une crise financière et monétaire si grave que le seul remède efficace paraît être la création d'une banque d'État capable de régulariser la situation monétaire et de donner au gouvernement les moyens nécessaires aux réformes. L'idée, émise dès 1883 par les hommes d'affaires, reçoit en 1901 l'adhésion de la Banque de Paris et des Pays-Bas. A partir de 1903, Delcassé et Saint-René Taillandier, ministre de France à Tanger, y voient la « clé » du futur protectorat, et passent un accord de principe avec un consortium de banques françaises dominé par la Banque de Paris et des Pays-Bas, au moment même où le gouvernement chérifien aux abois, demande et obtient de la France un nouvel emprunt (juin 1904). La position diplomatique de la France au Maroc est alors exceptionnellement forte : Delcassé a obtenu, par des accords successifs, le désistement de l'Italie, de l'Angleterre, et de l'Espagne ; il croit l'heure venue de présenter au maghzen un vaste programme de réformes parmi lesquelles figure, en bonne place, la création d'une banque d'État. Elle posséderait les monopoles de frappe, d'émission, de caisse et de trésorerie, d'emprunt et de crédit. L'auteur du projet, Regnault, cherche à obtenir, dans l'élaboration des statuts du nouvel établissement, des « garanties » de la part de Paribas, propres à assurer sur celui-ci, le contrôle du gouvernement français. L'accord n'est pas réalisé lorsque Saint-René se rend à Fès en janvier 1905 pour ouvrir les négociations. Mais l'Allemagne déclenche une crise diplomatique et reporte la solution à la décision d'une conférence internationale. L'Acte d'Algésiras (1906) donne le jour à une banque d'État du Maroc qui, bien qu'internationale par son capital et ses membres, assure à la France une place privilégiée et répond en grande partie au projet de son fondateur.Chappert Magali. Le Projet français de banque d'État du Maroc, 1889-1906. In: Revue française d'histoire d'outre-mer, tome 62, n°229, 4e trimestre 1975. pp. 567-593