Caodaïstes de Bến Tre (Viêt-nam) après 1975: la pratique médiumnique oraculaire en question

After reunification in 1975, the Communist government in Hanoi implemented various measures to control the Cao Ðài political and religious movement. These measures are still in place today, although one can see some signs of easing up on some specific branches of the movement. The reasons for such governmental mistrust can be found in the political and ideological basis of Caodaism, which appeared in the 1920s in Cochinchina, but also in the key role given to "spirit-writing" or cơ bút in all religious and political life. I examine the specifics of one case : the Ban Chinh Ðạo branch ("The Reformed Committee") also known as the Bến Tre branch, and its founder Nguyễn Ngoc Tương (1881-1951). What used to be a collective, public encounter with spirits (Cơ bút) was transformed by this "pope" into a private and meditative encounter without witnesses. By studying the oracular technique practised by this pope and analyzing the current process of elections of the branch dignitaries, this paper tries to identify the methods, variations and meaning of mediumistic practice within this Branch. I will also examine the role of oracular teachings, their exegesis and other forms of knowledge used to reach salvation, as well as relations established with the authorities after the advent of the Communist regime. Concentrating on Caodaist mediums will make it possible to outline the structuring features of its practice and its modalities of action in different political contexts.Depuis 1975, date de la prise du pouvoir national par les autorités communistes de Hanoi, l'État a mis en place un certain nombre de mesures visant à maîtriser le mouvement politico-religieux Cao Ðài. Ces mesures perdurent jusqu'à nos jours, montrant quelques signes d'ouverture selon les branches caodaïstes. Les causes d'une telle méfiance du gouvernement sont certainement à déceler dans les soubassements politiques et idéologiques du caodaïsme, apparu dans les années 1920 en Cochinchine, mais également dans la place structurante que ce mouvement confère à l'activité médiumnique oraculaire (ca bût) dans la vie religieuse et politique. J'aborderai ces spécificités en m'attardant sur l'une de ses branches - le Ban Chinh Ðñ Ðạo ("Comité de réforme") ou branche de Bén Tre - et sur son fondateur, le pape Nguyễn Ngọc Tương (1881-1951). D'une relation collective et publique avec les esprits, le cơ bút s'est transformé avec ce pape en une relation méditative privée et sans témoin. À travers l'étude de la technique oraculaire que pratiquait ce pape puis l'analyse du déroulement actuel d'élections pour la désignation de dignitaires, mon approche ethnologique tente de saisir les modalités et le sens de la pratique médiumnique au sein de cette branche. Seront examinés la place des enseignements oraculaires, de leur exégèse ou d'autres formes de savoir dans l'accès au salut, ainsi que le type de relation qui s'est instauré avec les autorités après l'avènement du régime communiste. Le fait de se concentrer sur le médiumnisme caodaïste permettra de dégager quelques traits structurants de sa pratique et des modalités d'action qui lui sont attachées dans des contextes politiques différents.Jammes Jérémy. Caodaïstes de Bến Tre (Viêt-nam) après 1975: la pratique médiumnique oraculaire en question. In: Aséanie 16, 2005. pp. 61-87