L'efficience de la cause: Le concept d'efficience naturelle dans la physique antique et classique

The purpose of this survey is to establish the role played by the evolution of theories of causality in the birth of classical physics. It presents itself as an alternative to the interpretations of the modern notion of cause proposed by positivism and the Heideggerian history of metaphysics. First, we show to what extent the ancient causal operator is different from the modern one. Whereas in the latter causality is thought of as a transitive and necessary relationship between homogeneous realities, the ancients conceive of causality as an absolute property, a pseudo-relation without converse where the effect belongs to a lesser ontological register. Thus, Plato and Aristotle have formulated the conditions of intelligibility of becoming, the principle of causality and cause-agent, but their physics remains formally incompatible with the laws of classical mechanics, just as determinism is unintelligible in all ancient philosophies. Finally, we study how, among neo-Platonic and then monotheistic thinkers, the idea of an efficient cause, that is to say an influx engendering the being of a thing and which, as such, can only be thought of in the form of a relationship. The second part shows the influence of causality as a relation in the formation of classical physics. The mechanistic project was to reconstruct the totality of objects of knowledge on nominalist bases opposed to those of ancient essentialism, efficient causality was for this reason its unique explanatory operator. In this way, the transfer model has made the mathematicization of movement possible and has made sufficient reason the principle of universal intelligibility. We finally establish that modern criticisms of causality are the consequences of the application of the efficient cause to the objects of metaphysics: God, substances, and ideas.Le propos de cette enquête est d’établir le rôle joué par l’évolution des théories de la causalité dans la naissance de la physique classique. Elle se présente comme une alternative aux interprétations de la notion moderne de cause proposées par le positivisme et l’histoire heideggerienne de la métaphysique. Dans un premier temps, nous montrons dans quelle mesure l’opérateur causal antique est différent de celui des modernes. Alors que chez ces derniers la causalité est pensée comme une relation transitive et nécessaire entre des réalités homogènes, les anciens conçoivent la causalité comme une propriété absolue, une pseudo-relation dépourvue de converse où l’effet appartient à un registre ontologique moindre. Ainsi, Platon et Aristote ont formulé les conditions d’intelligibilité du devenir, le principe de causalité et de la cause-agent, mais leur physique n’en reste pas moins formellement incompatible avec les lois de la mécanique classique, de même que le déterminisme est inintelligible dans l’ensemble des philosophies antiques. Enfin, nous étudions comment est apparue, chez les penseurs néo-platoniciens, puis monothéistes, l’idée d’une cause efficiente, c’est-à-dire d’un influx engendrant l’être d’une chose et qui, en tant que tel, ne se laisse penser que sous la forme d’une relation. La deuxième partie montre l’influence de la causalité comme relation dans la formation de la physique classique. Le projet mécaniste fut de reconstruire la totalité des objets du savoir sur des bases nominalistes opposées à celles de l’essentialisme ancien, la causalité efficiente fut pour cela son opérateur explicatif unique. De cette façon, le modèle du transfert a rendu possible la mathématisation du mouvement et a fait de la raison suffisante le principe d’intelligibilité universel. Nous établissons enfin que les critiques modernes de la causalité sont les conséquences de l’application de la cause efficiente aux objets de la métaphysique : Dieu, les substances et les idées