Des ordres négociés: Légitimation du travail de police et formation quotidienne de l'État dans un quartier populaire du Malawi

This thesis shows that the formation of the State in a given territory - an unconscious and contradictory process of vulgarisation of state power according to a perspective inspired by B. Berman and J. Lonsdale - is largely due to the social positions of its agents and to the practical conditions of their cohabitation with the different social groups and political authorities that inhabit it. It is based on a symmetrical ethnography of the daily relations between police officers, individuals involved in community policing organisations and residents of a working-class neighbourhood in the economic capital of Malawi. The analysis examines the effects of a police reform based on the doctrine of community policing, on the power relations that structure the local police arena. The aim is to articulate the study of policing with the making of public, social and political orders. The thesis thus combines a sensitive analysis of practices with an attention to the production of social hierarchies, the dispositions, trajectories and social representations of individuals. Conducted between 2015 and 2019, the ethnography is coupled with archival work that allows us to reconstruct the social history of the encounter between the police institution and the inhabitants of the neighbourhood, to account for the conditions of emergence of a plurality of non-state organisations invested in the production of security and to apprehend the historicity of the orders studied. Navigating at the interface between the police and the civilian, this thesis combines in the same study reflections on state policing and vigilantism. It contributes to the reflection on what happens at the frontier between these two worlds, without losing sight of the question of the ordinary relationship of the governed to police action. It focuses particularly on the negotiation games at the heart of police work, which reveal the processes of legitimisation of orders and, in turn, of the position of the State in the neighbourhood.Cette thèse montre que la formation de l’État dans un territoire donné – processus inconscient et contradictoire de vulgarisation du pouvoir étatique selon une perspective inspirée de B. Berman et J. Lonsdale – tient en grande partie aux positions sociales de ses agent·es et aux conditions pratiques de leur cohabitation avec les différents groupes sociaux et autorités politiques qui l’habitent. Elle se base sur l’ethnographie symétrique des rapports quotidiens entre fonctionnaires de police, individus engagés dans des organisations de police communautaire et habitant·es d’un quartier populaire de la capitale économique du Malawi. L’analyse interroge les effets sur les rapports de pouvoir qui structurent l’arène policière locale d’une réforme de l’action policière fondée sur la doctrine du community policing. Le propos consiste à articuler l’étude du travail de police avec celle de la fabrique des ordres public, social et politique. La thèse combine ainsi un regard sensible à l’analyse des pratiques et une attention à la production des hiérarchies sociales, aux dispositions, trajectoires et représentations sociales des individus. Menée entre 2015 et 2019, l’ethnographie se double d’un travail d’archives qui permet de restituer l’histoire sociale de la rencontre entre institution policière et habitant·es du quartier, de rendre compte des conditions d’émergence d’une pluralité d’organisations non-étatiques investies dans la production de sécurité, et d’appréhender l’historicité des ordres étudiés. Naviguant à l’interface entre le policier et le civil, cette thèse combine dans une même étude les réflexions sur les polices étatiques et celles sur le vigilantisme.Elle contribue à la réflexion sur ce qui se joue à la frontière entre ces deux mondes, sans perdre de vue les rapports ordinaires à l’action policière des gouverné·es. Elle se penche tout particulièrement sur les jeux de négociation au cœur du travail de police, conçus comme autant de révélateurs des processus de légitimation de l’ordre et, en creux, de la position de l’État dans le quartier