La population Rom à Marseille et le suivi en médecine générale de droit commun : quelles expériences, attentes et freins ?

Introduction : la santé des Roms migrants est un sujet peu exploré. Les quelques études réalisées à l’échelle de l’Europe constatent cependant toutes la même chose : un état de santé nettement dégradé au sein de cette population. Malgré différents dispositifs mis en place en France, il est constaté que l’obtention de droits à la sécurité sociale n’est pas le garant d’un recours effectif aux soins. L’objectif de cette étude était d’évaluer le ressenti, les attentes et les freins lors du suivi en médecine générale de droit commun de la population Rom à Marseille, dans le but d’améliorer leur prise en charge. Matériel et méthode : il s’agissait d’une étude qualitative par entretiens individuels ouverts auprès de personnes issues de la population Rom de Marseille. Le recrutement était réalisé selon un échantillonnage ciblé et homogène. Nous avons réalisé une retranscription manuelle du verbatim avec anonymisation des données sur WORDÒ. L’analyse des données a été faite selon une méthode inspirée de la phénoménologie interprétative (IPA). Résultats : le rapport à la santé des personnes que nous avons interrogées est marqué par différents éléments et a un impact sur l’expérience en médecine générale. La communication a une place centrale dans l’expérience du soin, et détermine le parcours des personnes rencontrées. La capacité à s’exprimer en français permet une certaine autonomisation. Cependant, un accompagnement apparaît nécessaire pour les personnes que nous avons rencontrées, que ce soit dans les démarches administratives mais aussi lors des consultations. Cet accompagnement permet l’orientation dans le parcours de soin ainsi que la communication avec le médecin, en assurant la traduction. Il y a donc une dépendance dans l’accès aux soins. Il apparaît toutefois que la poursuite d’une relation de soin avec un médecin est choisie par le patient. Le médecin traitant à un rôle central dans la prise en charge et est considéré comme un médecin de famille. La fidélisation dans la relation de soin repose sur la relation de confiance qui se crée. Les personnes interrogées expriment au premier plan des attentes humaines et relationnelles, mais recherchent aussi des compétences biomédicales. Discussion et conclusion : le récit des personnes que nous avons interrogées à mis en lumière la complexité de leurs expériences. Les histoires de vies sont marquées par la stigmatisation, le racisme et les difficultés économiques. Ces déterminants ont un retentissement sur le parcours de soin et les attentes vis-à-vis du médecin. Il s’avère que la présence d’un réseau de soutien et d’aide est nécessaire pour pouvoir envisager un accès aux soins. La maîtrise du français étant un élément déterminant du parcours de soin, il apparaît fondamental de prendre en considération la communication ainsi que ce qui peut l’entraver. Dans la construction de la relation avec un médecin, les attentes principales visent à la création d’un lien social. Les personnes rencontrées expriment le besoin d’être écoutées et considérées en tant qu’individu. Dans ce contexte, la pluridisciplinarité et la collaboration des différents acteurs participant à la prise en charge de ces personnes est essentielle. Bien que le médecin généraliste ait un rôle à jouer, l’approche médicale n’est pas suffisante pour dépasser les entraves aux soins que nous avons abordées. La réévaluation des politiques publiques actuelles est indispensable, afin de permettre une réelle intégration dans le parcours de droit commun