Différences et solidarités. À propos du parcours philosophique d'Iris Marion Young

Malgré la relative méconnaissance dont elle fait encore l’objet en France, Iris Marion Young (1949-2006) est l’une des représentantes les plus importantes de la philosophie politique féministe américaine contemporaine. Adossée à un engagement militant, l’œuvre de Young s’enracine initialement dans le champ de la théorie féministe et met en dialogue différentes perspectives philosophiques dans le but de dépasser un certain nombre d’oppositions qui grèvent, selon elle, la réflexion féministe. Confrontant les théories de la justice anglo-saxonnes à la tradition philosophique ‘continentale’, celle-ci incluant aussi bien la french theory que l’héritage de l’École de Francfort, Young a tenté de renouveler la théorie critique de façon à y inclure centralement les questions posées par la philosophie féministe et les problèmes que cette dernière a dû affronter ces vingt dernières années — de la question du statut de la différence sexuelle à celle du sujet politique du féminisme. C’est dans les concepts d’oppression et de différence que l’on peut trouver un fil directeur à cette pensée qui, de la phénoménologie de l’expérience corporelle à la mise à l’épreuve du paradigme de la démocratie délibérative, a cherché, d’une part, à déterminer les formes plurielles et les logiques de l’oppression et, d’autre part, à y répondre par l’élaboration d’une politique de la différence qui permette la reconnaissance des différences tout en évitant le piège de leur réification