L’enseignement de la modélisation en classe de lycée : étude des praxéologies épistémologiques chez deux enseignants expérimentés

International audienceIn the latest curricula for the teaching of physical sciences in secondary schools in France (BOEN, 2007, 2012), there is an increase in the place given to the epistemology of these disciplines: in particular, there are new skills ("interpreting", "developing and carrying out a protocol", "practising a scientific approach" ...) associated with different scientific contents. However, it is not easy for the reader to identify a general epistemological stance and a characterisation of the epistemological level of any particular scientific knowledge to be taught. Moreover, most teachers have had little or no exposure to the field of epistemology in their training, which makes it even more difficult to interpret these instructions. English-language research (Nott & Wellington, 1996, Tsai, 2002, Water-Adams, 2006) has established that the epistemological knowledge transmitted in the classroom is based on an interweaving of teachers' conceptions of epistemology, of learning and of teaching science. We believe that the activities carried out in physics classrooms depend less on teachers' knowledge of the epistemology of physics than on the teaching practices from which they build their relationship to the teaching of epistemology. To test this hypothesis, we need to access the epistemological knowledge taught in class, the ways of teaching it, the references to which this knowledge and these practices refer, the factors underlying the choice of contents and teaching methods, and the role played by the teachers' relationship to the epistemology, to the teaching and to the learning of physics in high school. For this purpose, we recorded two sessions of two teachers who intend to teach what models and modelling are, but for whom the main objective remains to teach physics knowledge. The sessions were preceded and followed by interviews. We used DAT (Chevallard, 1999) as a framework for analysing the corpora to study the praxeologies (related to the knowledge of physics and related to the knowledge of epistemology) of these teachers. Although the private components of the teachers' personal relationships with modelling are identical, and the types of tasks relating to epistemology or physics are found in both sessions, the praxeologies remain contrasted, in connection with the degree of support provided by a support system in the implementation of epistemological knowledge in the classroom: the latter influences practices by promoting the didactic transposition of modelling and by developing an institutional relationship with this object, which is not very formalised. Both in English-speaking studies on the nature of science and in French-speaking didactic studies, this study brings a new approach to characterize the "ordinary" practices of teaching epistemology.On constate dans les derniers programmes d’enseignement des sciences physiques dans le secondaire en France (BOEN, 2007, 2012) une augmentation de la place faite à l’épistémologique de ces disciplines : on y trouve notamment de nouvelles compétences (« interpréter », « élaborer et réaliser un protocole », « pratiquer une démarche scientifique » …) associées à différents contenus scientifiques. Mais il n’est pas aisé pour le lecteur d’en dégager une posture épistémologique générale et une caractérisation sur le plan épistémologique tel ou tel savoir scientifique à enseigner. De plus, les enseignants dans leur majorité n’ont pas ou peu rencontré le domaine de l’épistémologie en formation, ce qui rend encore plus difficile l’interprétation de ces instructions. Des recherches anglophones (Nott & Wellington, 1996, Tsai, 2002, Water-Adams, 2006) ont établi que les savoirs épistémologiques transmis en classe reposent sur une imbrication des conceptions des enseignants sur l’épistémologie, sur l’apprentissage et sur l’enseignement des sciences. Nous pensons à partir de là que les activités conduites en classe de physique dépendent moins des connaissances des enseignants sur l’épistémologie de la physique que des pratiques d’enseignement à partir desquelles ils construisent leur rapport à l’enseignement de l’épistémologie. Pour tester cette hypothèse, nous devons accéder aux savoirs épistémologiques enseignés en classe, aux manières de les enseigner, aux références auxquelles ces savoirs et ces pratiques renvoient, aux facteurs sous-jacents aux choix des contenus et des méthodes d’enseignement, et au rôle que jouent le rapport des enseignants à l’épistémologie, à l’enseignement et à l’apprentissage de la physique en lycée. Nous avons pour cela enregistré deux séances de deux enseignants qui ont l’intention d’enseigner ce que sont les modèles et la modélisation, mais pour qui l’objectif principal reste d’enseigner des savoirs de la physique. Les séances ont été précédées et suivis d’entretiens. Nous avons utilisé la TAD (Chevallard, 1999) comme cadre d’analyse des corpus pour étudier les praxéologies (liées aux savoirs de la physique et liées aux savoirs de l’épistémologie) de ces enseignants. Bien que les composantes privées des rapports personnels des enseignants sur la modélisation soient identiques, et que des types de tâches relevant de l’épistémologie ou de la physique se retrouvent dans les deux séances, les praxéologies restent contrastées, en lien avec le degré d’appui que fournit un dispositif d’accompagnement dans la mise en œuvre en classe des savoirs épistémologiques : celui-ci influe sur les pratiques en favorisant la transposition didactique de la modélisation et en élaborant un rapport institutionnel à cet objet aussi peu formalisé par ailleurs. Tant au niveau des études anglophones sur la nature de la science que dans les études didactiques francophones, cette étude apporte une nouvelle approche pour caractériser les pratiques « ordinaires » d’enseignement de l’épistémologie