Paléoenvironnements et stratigraphie des couches à rhodolithes et des constructions à algues corallines du Pliocène du Bassin de Carboneras (SE de l’Espagne)

Dans le bassin de Carboneras (SE de l’Espagne), on observe d’épaisses couches à rhodolithes dans le cortège transgressif et dans celui de haut niveau de la séquence du Pliocène inférieur. Ces accumulations se sont produites sur la portion moyenne à externe d’une rampe. Durant la phase de transgression, on les trouve du côté sous le vent d’un cordon littoral, alors que, durant la phase de haut niveau relatif qui lui succède, ce même type de dépôts est restreint à la seule marge méridionale du bassin. L’élévation des couches à rhodolithes comparée avec celle des dépôts littoraux contemporains suggère que ces couches se sont développées à des profondeurs de quelques dizaines de mètres, mais probablement sans dépasser 50 mètres. Cette estimation de la paléo-profondeur est cohérente avec la composition de l’association phycologique, dominée par les mélobésioïdes communes dans les environnements de plates-formes relativement profonds dans l’actuelle mer Méditerranée. Le complexe à Lithophyllum incrustans Philippi, 1837-L. racemus (Lamarck) Foslie, 1901 avec Lithothamnion minervae Basso, 1995, Lt. philippii Foslie, 1909 et Mesophyllum alternans (Foslie) Mendoza & Cabioch, 1998 dominants et Phymatolithon calcareum (Pallas) Adey & McKibbin, 1970, M. macroblastum (Foslie) Adey, 1970 et lithophylloidés minoritaires est le plus fréquent avec un total de 21 espèces enregistrées. Toutes ces espèces d’algues se retrouvent dans l’actuelle Méditerranée à l’exception de Lithothamnium ramosissimum (Reuss) Piller, 1994, qui est éteinte, et de Spongites decipiens, présente dans l’aire indo-pacifique et dans l’océan Atlantique sud mais inconnue en Méditerranée. Au cours de l’intervalle transgressif, un hydrodynamisme modéré et un faible taux de sédimentation ont favorisé la formation des rhodolithes. Durant la période de haut niveau qui suit, ces conditions persistent sur la marge sud du bassin tandis qu’ailleurs les apports silico-clastiques entraînent une réduction de la part de la production carbonatée. On observe alors des bioconstructions à algues, bryozoaires et bivalves, sous forme de piliers isolés, jusqu’à 90 cm de hauteur, ou des taches irrégulières, de 2 m de hauteur et de 7 m d’extension, au sein des calcarénites fines de la rampe externe. Malgré leur ressemblance avec les piliers et constructions peu protubérantes dues aux algues corallines de la Méditerranée actuelle, appelé « coralligène de plateau », ces bioconstructions sont originales car ce sont les bryozoaires qui sont les principaux contributeurs, les algues corallines (Lt. philippii et M. lichenoides) n’y jouant qu’un rôle secondaire. À la différence de ce qui s’observe dans la Méditerranée actuelle, l’absence de débris bioclastiques dans les sédiments à granulométrie fine à proximité des constructions algaires pliocènes du bassin de Carboneras suggère que celles-ci ne devaient pas créer de relief significatif sur le fond marin de l’époque.Thick rhodolith beds occur in the transgressive and highstand systems tracts of the early Pliocene sequence in the Carboneras Basin in SE Spain. Rhodolith beds accumulated in mid-to-outer ramp settings and in the leeside of a spit platform during the transgressive interval, whereas rhodolith concentrations in the highstand deposits only formed in the mid-to-outer ramp at the southern margin of the basin. The elevation of rhodolith beds compared with coeval shore deposits suggests that the beds developed at water depths of several tens of metres (probably less than 50 m). This palaeodepth estimate is consistent with the composition of algal assemblages, which are dominated by melobesioids common in relatively deep platform environments in the modern Mediterranean Sea. Lithothamnion minervae Basso, 1995, L. philippii Foslie, 1909, and Mesophyllum alternans (Foslie) Mendoza & Cabioch, 1998 with subordinate (Pallas) Adey & McKibbin, 1970 and M. macroblastum (Foslie) Adey, 1970 and lithophylloids of the Lithophyllum incrustans Philippi, 1837-L. racemus (Lamarck) Foslie, 1901 complex are the most common of a total of 21 recorded species. All the identified algal species are also living in the present-day Mediterranean except for the extinct Lithothamnion ramosissimum (Reuss) Piller, 1994 and for the recent Spongites decipiens (Foslie) Chamberlain, 1993, which has been reported in the Indo-Pacific and South Atlantic, but not in the Mediterranean. Moderate energy and low sedimentation rates promoted development of rhodolith beds in the transgressive deposits, but they are not exclusive to the transgressive systems tract as they continued to accumulate at the southern margin during the highstand, beyond the influx of siliciclastics that reduced carbonate production in the rest of the basin. Isolated pillars (up to 90 cm high) or irregular patches (up to 2 m high and 7 m wide) of coralline algal-bryozoan-bivalve bioconstructions occur in outerramp fine-grained calcarenites. Despite their similarities to pillars and low relief buildups constructed by coralline algae (“coralligène de plateau”) in the present-day Mediterranean Sea, these bioconstructions are unique as bryozoans are the main builders and coralline algae (L. philippii and M. lichenoides) play only a secondary role. In contrast with modern Mediterranean coralline algal buildups, the lack of bioclastic debris derived from the build-ups in the surrounding fine-grained sediments and their general morphology suggest that the Pliocene bioconstructions in the Carboneras Basin did not create significant positive relief on the seafloor.