Destins de migrants et constitution du sujet

Migrant’s desunies and constitution of the subject Narrative identity, which puts personal fates into words, enables to grasp the indisputable work of reflexivity, which is being accomplished by the migrants who live the experience, both objective and subjective, of a sociocultural discrepancy. It is, indeed, the transition from a society to another, and the ensuing disadjustment, which makes the subject, calls for a real subjective work of interpretation of the lived worlds and for a distanced rebuilding of the self. The intensity of this work owes something to the symbolic distance, which separates the immigrant’s aspirations from the objective chances of their fulfilment within the host society. That is why the making of the migrant into a subject would not be totally complete without the further addition of his ability to criticize the world in which he now moves. Nevertheless, it is necessary to wonder about the precise nature of this criticism, about the right distance - which is hard to find - between a radical opposition to, and a conformist integration in, the host society. It is through the accounts by nine European citizens who have come to settle in France that we have thus wished to qualify the figure of the «foreigner» as the archetype of the subject.L’identité narrative, qui met en mots des destins personnels, permet de saisir l’incontestable travail de réflexivité des migrants qui vivent l’expérience, tant objective que subjective, d’un décalage socioculturel. C’est bien, en effet, le passage d’une société à une autre, ce désajustement qui fait le sujet, appelle de sa part un véritable travail subjectif d’interprétation des mondes vécus et de reconstruction distanciée de soi. Un travail dont l’intensité doit toujours quelque chose à la distance symbolique qui sépare les aspirations de l’immigré des possibilités objectives de leur réalisation au sein de la société d’accueil ; c’est pourquoi la constitution du migrant en sujet ne saurait être tout à fait complète sans qu’y soit également associée sa capacité à critiquer le monde dans lequel il évolue désormais. Néanmoins, il est nécessaire de s’interroger sur la nature exacte de cette critique, sur la bonne distance, difficile à trouver, entre opposition radicale et intégration conformiste à la société d’accueil. C’est ainsi que nous avons souhaité nuancer la figure de l’«étranger» comme archétype du sujet à travers neuf récits d’européens venus s’installer en France.Sanselme Franck. Destins de migrants et constitution du sujet. In: Cahiers de sociologie économique et culturelle, n°37-38, 2002. pp. 83-113