«La guerre de l'Impératrice» : Eugénie de Montijo vue par la presse lorraine au lendemain du conflit franco-allemand (1871-1879)

La « guerre de l’impératrice » est un concept bien connu des historiens du Second Empire, mais celui-ci a t’il fait l’objet d’une étude approfondie? Façonnée tout d’abord par les républicains et usitée notamment par la presse, cette expression doit sa paternité à une formule qu’aurait tenue Eugénie de Montijo à propos de la guerre franco-allemande de 1870. Pourtant démentie, cette expression lui colle à la peau pendant de nombreuses décennies lui imputant ainsi l’entière responsabilité d’un conflit aux graves conséquences en France mais aussi tout en Europe. Cette étude n’est pas une autre biographie de l’impératrice Eugénie mais tient le pari, deux ans après la commémoration du centenaire de sa disparition, de proposer une réévaluation historiographique de cette figure méprisée, stéréotypée et méconnue de l’Histoire de France. Une réévaluation qui participe à toute une vague de nouveaux travaux universitaires sur le Second Empire qui depuis une vingtaine d’années, permet un profond renouvellement bibliographique et historiographique de ce champ d’études. Plus encore, cette étude de l’impératrice Eugénie dans la guerre de 1870 fut décidée et menée par un prisme différent et inédit à savoir la presse lorraine qui devient de plus en plus abondante et diversifiée dans le dernier tiers du XIXe siècle ; se situant ainsi à une charnière de l’histoire de la presse, entre la loi qui libéralise partiellement la presse en 1868 et celle de la liberté totale de la presse en 1881. Ainsi, cette « décennie décisive » comme l’ont encore récemment qualifiée certains historiens est caractérisée du point de vue de la vie de l’impératrice Eugénie par un exil autant moral que physique qui reste encore trop méconnu des historiens. De fait, il s’agit, par l’utilisation de la presse lorraine comme document d’histoire, de voir comment cette femme exilée est devenue l’objet d’une répulsion absolue et le bouc émissaire d’un conflit dont le spectre continue d’outrager la conscience publique durant une décennie entière. Un déclin de la détestation et de la virulence dans les différents entrefilets qui se tarissent au fur et à mesure où la menace « impérialiste » décline d’elle-même ainsi qu’au fur et à mesure que le spectre de la guerre de 1870 s’éloigne des esprits