De l'emprise au passage à l'acte : la question de l'irresponsabilité pénale dans les violences conjugales

La situation d’emprise est une relation de domination ayant pour but de détruire l’estime de soi et la personnalité de la victime, moyennant une manipulation destinée à anéantir l’intégrité et tout volonté de la personne. Bien qu’il existe des techniques de sortie, des dispositifs d’aides et que l’État s’y intéresse toujours de plus en plus, les situations dramatiques sont toujours trop nombreuses. Le meurtre de la victime sous emprise ébranle toujours l’actualité et amène les gouvernements à revoir leurs politiques sécuritaires et à agir d’autant plus. Cependant, certaines victimes n’ayant pas été aidé ou n’ayant pas pu demander de l’aide du fait de la situation d’emprise, commettent souvent l’irréparable : le suicide ou le meurtre de son agresseur afin de se libérer de cet « enfer conjugal ».Face à cette issue tragique, qu’en est-il de la responsabilité pénale à ce niveau-là ? Est-ce que la violence infligée excuse l’acte irréparable ? Est-ce que l’emprise peut être un moyen de défense, une cause d’irresponsabilité pénale ? Le compte rendu du Grenelle contre les violences conjugales de 2019 a annoncé faire entrer la notion d’emprise dans le code civil et le code pénal, une procédure pénale aux fins de condamnation de l’agresseur et une procédure civile pour obtenir un divorce en cas de mariage. Cependant, l’emprise n’est pas abordée comme moyen de défense face au meurtre de l’agresseur, comme cause irresponsabilité pénale à proprement parlé. De nombreux débats sont alors venus animer cette question. Entre modification de l’écriture de l’article 122-5 du code pénal sur la légitime défense, création d’une légitime défense « différée » spécifique au phénomène de l’emprise, reconnaissance du « syndrome de la femme battue », reconnaissance de l’emprise comme contrainte morale altérant le discernement, les propositions sont nombreuses. Alors que cette question de la responsabilité pénale de ces auteurs de meurtres dont la motivation première est la survie, les législations du monde entier divergent. En France, même si ces propositions paraissent politiquement innovantes en s’inspirant notamment du modèle canadien, elles apparaissent toutefois complexes au niveau juridique et en termes d’encadrement par la loi. A ce jour, le législateur n’a toujours pas fait le choix d’accueillir de telles propositions de lois dans notre Droit en reconnaissant l’emprise comme moyen de défense, mais tend plutôt à renforcer la prévention et les dispositifs d’aides afin d’éviter les passages à l’acte criminel des victimes