L'inscription de la classification bibliographique dans le champ des sciences (fin XVIIe-début XVIIIe s.)

Entre le XVIIe et le XVIIIe siècles, l\u27art de la connaissance des livres (ou " bibliographie ") a vu son statut profondément modifié. Sortie du champ de la seule pratique professionnelle, cette discipline est désormais reconnue par les savants comme un auxiliaire privilégié des sciences, voire comme une science à part entière. Le perfectionnement de l\u27une des composantes de la bibliographie, la classification méthodique des bibliothèques, a joué un rôle essentiel dans le nouveau regard porté sur la discipline bibliographique. Dans le contexte du mouvement général de mise en ordre des savoirs à l\u27âge classique, l\u27élaboration du système bibliographique commun a bénéficié de l\u27apport théorique de trois savants bibliographes du règne de Louis XIV : le jésuite Jean Garnier et les libraires Prosper Marchand et Gabriel Martin. Jean Garnier construit pour le collège de Clermont une classification à base philosophique (Systema bibliothecae..., 1678) mettant en relation facultés de l\u27esprit, tableau des sciences et classement des livres. Si sa méthode ne fait pas école dans l\u27immédiat, elle influence cependant, à la génération suivante, les deux libraires à l\u27origine du système bibliographique des libraires de Paris, P. Marchand et G. Martin. Tandis que Marchand élabore pour son propre compte une classification reposant sur une méthodologie très rigoureuse qui promeut la bibliographie comme discipline introductive aux autres sciences, Martin réussit à marier la classification traditionnelle à 5 divisions avec un arrangement méthodique non moins rigoureux. Les bases sont ainsi jetées pour conférer à la classification bibliographique, et à la bibliographie en général, la dignité d\u27une véritable science