Montesquieu, le chantier génétique

L'important corpus manuscrit de Montesquieu n'a fait l'objet jusqu'à présent que de travaux peu nombreux, alors même que les bases d'une étude systématique avaient été jetées dès les années cinquante, notamment grâce aux recherches de R. Shackleton sur les écritures des secrétaires de Montesquieu, et que les manuscrits étaient accessibles (à la Bibliothèque nationale de France et à la bibliothèque municipale de Bordeaux, où les fonds se sont considérablement enrichis avec la dation de 1994). On s'interroge ici sur les raisons de cette lacune, qui paraît tenir au statut même de l'oeuvre du philosophe, avant de montrer quelles méthodes peuvent être développées, grâce à l'analyse conjointe des écritures et des papiers. Il devient ainsi possible, à partir de documents d'une exceptionnelle diversité (le manuscrit « mort » de L'Esprit des lois conservé à la BnF ou des fiches et des cahiers correspondant à des travaux en cours et inachevés), de rendre compte « sur le vif » de la méthode de travail et des processus d'écriture de l'écrivain