Contraintes chronologiques et biogéochimiques grâce au méthane dans la glace naturelle : une application aux forages du projet EPICA

With the start of the 21st century, it becomes obvious that human activities directly or indirectly impact the climate system. It is thus of high priority to improve future climate simulations and their consequences. Part of this priority relies on exploring the past.Air extracted from polar ice in Greenland and Antarctica is a fantastic recorder of past changes in the Earth's atmospheric composition. Data obtained on several ice cores have shown a strong correlation between the mixing ratio of greenhouse gases (CO2, CH4, N2O) and temperature, on a time scale of hundreds of thousands of years. These data have revealed that the currently elevated greenhouse gas mixing ratios had no equivalent over the last 650'000 years, within the resolution limit of the records. Lastly, these records offer the opportunity to better understand the link between climate and the biogeochemical cycles responsible for past greenhouse gas changes, which may feedback on the future climate. Our PhD work consisted first in measuring at high temporal resolution methane in air bubbles of the new drilling sites EPICA, at Dome C and at Dronning Maud Land. These measurements allowed us (i) to propose a scheme for the causes of the methane / climate link during the last 800'000 years, and (ii) to improve the chronologies of trapped gases in ice cores, and in parallel to discuss the sequence of climatic events recorded in both hemispheres and in Antarctic ice cores.We conclude that the low frequency modulation of methane mixing ratios is probably linked to the variability of Asian monsoon and to the shift of the Intertropical Convergence Zone. Superimposed on this low frequency modulation, high latitudes wetlands may have switched on and off during major transitions between glacial and interglacial conditions. At millennial time scale, we show the ubiquity of rapid climate changes during the last eight glacial periods, and the probable persistence of the bipolar seesaw mechanism of energy redistribution between the two poles.Calculations of the difference of age between trapped air and the surrounding ice (delta age) is affected by large errors for past climatic conditions. Using the synchronization of methane signals between the EPICA ice cores, and the beryllium-10 anomaly associated with the geomagnetic event of Laschamp, we have been able to re-evaluate delta age and to show that it is largely overestimated by the firn densification model during the last glacial period. This brings us to lower the delay of carbon dioxide over Antarctic temperature at the start of the last glacial-interglacial transition. The exact causes of this delta age overestimate in glacial conditions are still unknown at the end of this PhD ; but they probably involve together the uncertainties related with climate parameters (temperature, accumulation) used as boundary conditions for the model, and the physics of firn densification under glacial conditions.Alors que le troisième millénaire vient à peine de commencer, il devient de plus en plus évident que les comportements humains ont des impacts directs et indirects sur le système climatique terrestre. Face à ce constat, l'objectif prioritaire est d'améliorer les simulations numériques des modifications futures du climat et de leurs conséquences. Une partie de la réponse se trouve dans l'exploration du passé. L'air extrait des glaces polaires du Groenland et de l'Antarctique constitue un véritable témoin des évolutions passées de l'atmosphère de notre planète. L'exploitation des données issues des carottes de glace a mis en évidence une forte corrélation entre les teneurs atmosphériques en gaz à effet de serre (CO2, CH4, N2O) et la température depuis des centaines de milliers d'années. Ces études ont par ailleurs révélé que les concentrations élevées en gaz à effet de serre aujourd'hui n'ont pas d'équivalent sur les derniers 650'000 ans, dans la limite de résolution des analyses. Enfin, elles offrent l'opportunité de mieux comprendre le lien entre climat et cycles biogéochimiques, responsable des variations passées de ces gaz et susceptible de rétroagir sur le climat futur. Ce travail de thèse a consisté dans un premier temps à analyser à haute résolution temporelle le méthane piégé dans les bulles d'air des récents forages antarctiques EPICA, à Dôme C et à Dronning Maud Land. Ces analyses nous ont permis ensuite (i) de conceptualiser les causes du lien méthane/climat au cours des derniers 800'000 ans et (ii) d'améliorer la chronologie des gaz piégés dans la glace, tout en discutant la séquence des événements climatiques entre les deux hémisphères.Nous concluons que la modulation à basse fréquence des niveaux de méthane est probablement liée à la variabilité de la mousson asiatique et au déplacement de la zone de convergence intertropicale. A cette modulation se superpose l'apport des zones humides des hautes latitudes lors des transitions glaciaires-interglaciaires. A l'échelle millénaire, au cours des huit dernières périodes glaciaires, nous montrons l'omniprésence d'une variabilité climatique rapide et la persistance probable d'un mécanisme de bascule bipolaire, redistribuant l'énergie entre les deux pôles et au sein des forages antarctiques. Le calcul de la différence d'âge entre les bulles d'air et la glace environnante (delta âge) est entaché de larges erreurs pour les conditions climatiques passées. Grâce à la synchronisation des signaux de méthane entre les carottes EPICA, et en utilisant l'anomalie de béryllium-10 associé à l'événement géomagnétique de Laschamp, nous avons pu ré-évaluer ce delta âge et montrer une forte surestimation par le modèle de densification du névé pendant la dernière période glaciaire. Ceci nous conduit à réviser à la baisse le retard du dioxyde de carbone sur la température antarctique en début de transition glaciaire-interglaciaire. Les causes exactes de cette surestimation du delta âge en conditions glaciaires restent indéterminées au terme de la thèse ; mais elles impliquent très probablement à la fois les incertitudes sur les paramètres climatiques d'entrée du modèle (température, accumulation) et la physique de la densification du névé en conditions glaciaires