Corrosion du titane et de ses alliages en milieu primaire de réacteur à eau pressurisée : effet des paramètres environnementaux

For their good mechanical properties, corrosion resistance and low neutron activation, titanium alloys are good candidates for the manufacture of some structural components of the primary circuits of Pressurised Water Reactors (PWR). Nevertheless, very few studies have been devoted to their durability under these conditions.The objective of this work was to identify and quantify the effect of environmental parameters on the corrosion mechanisms and kinetics of commercially pure titanium (CP Ti) and two titanium alloys (alpha + beta – Ti64 and metastable beta – Ti10-2-3). The effect of variations in pH (between 7.2 and 6.4) and in the velocity of the medium in the vicinity of the samples (up to 7.8 m/s) were studied at 300 °C. The applicability of experiments conducted at 350 °C to accelerate the kinetics and extrapolate the long-term behaviour of the samples was also investigated.Multiscale characterisations were carried out to propose a corrosion mechanism and to quantify the dissolution and precipitation kinetics of the corrosion products in each condition. They consisted in optical and electronic microscopic observations, associated with image analysis, EDS and Raman spectroscopic analysis, X-ray diffraction and photoelectrochemistry. The estimation of hydrogen contents permitted to quantify the kinetics of absorption by the metal of some of the hydrogen produced by the reduction of water.The oxidation of titanium leads to the formation of a continuous TiO2 layer (rutile and/or anatase depending on the material and conditions) topped by crystallites (anatase TiO2 and/or magnetite Fe3O4 and/or ilmenite FeTiO3 depending on the conditions).The transport of point defects through the continuous oxide layer consumes the metal and releases titanium hydroxides in solution. In aqueous media, only oxygen vacancies contribute to the formation of the continuous oxide layer. However, the contribution of other defects to the corrosion process should not be neglected. The rate of corrosion is controlled by the rate of dissolution of the oxide and complexation of the titanium species, which depends on the deviation from the solubility limit and thus on the rate of species transport in the solution. The precipitation of ilmenite on the surface of the samples protects them from corrosion. The rate of corrosion and hydrogen uptake becomes negligible once the surface is fully covered with ilmenite. At 300 °C, this full coverage occurs within about 3500 h in an autoclave and only 200 h of exposure with a fluid velocity of 7.8 m/s. In the case of a system with continuous purification of the medium, this layer can nevertheless partially dissolve, due to the maintenance of the deficit of titanium hydroxides in solution.At low fluid velocity, the corrosion rate of the three studied materials was estimated at 1 µm/year at pH300°C = 6.4, 2 µm/year at pH300°C = 7.2 and 13 µm/year at pH350°C = 7.7. It decreases as the pH decreases while the rate of hydrogen uptake increases. One way to limit the risk of hydrogen embrittlement at room temperature is to increase the surface-to-volume ratio of the parts used. The 50°C increase accelerated the kinetics by at least a factor of four but resulted in the appearance of an unexplained oxide thickening phenomenon for CP Ti. If this thicknening becomes consistent over time, high temperature acquired data may not be easily extrapolated to lower temperatures. The decorrelation between the effect of pH and temperature was made.The increase in fluid velocity accelerated the transport of material in solution and increased the corrosion rate before full coverage by ilmenite. This was estimated between 6 and 9 µm/year for CP Ti and between 11 and 22 µm/year for Ti64/Ti10-2-3 at pH300 °C = 7.2. In this regime, the hydrogen uptake increases with the fluid velocity by the same order of magnitude as the corrosion rate.Du fait de leurs propriétés mécaniques, leur résistance à la corrosion et leur faible activation neutronique, les alliages de titane sont de bons candidats pour la fabrication de certains composants de structure des circuits primaires de Réacteurs nucléaires à Eau Pressurisée (REP). Néanmoins, très peu d’études ont été consacrées à leur durabilité dans ces conditions.L’objectif de ce travail a été d’identifier et de quantifier l’effet des paramètres environnementaux sur les mécanismes et les cinétiques de corrosion du titane commercialement pur (T40) et de deux alliages de titane (alpha + beta – TA6V et beta métastable – Ti10-2-3). L’effet de variations de pH (entre 7,2 et 6,4) et de la vitesse du milieu au voisinage des échantillons (jusqu’à 7,8 m/s) ont été étudiés à 300 °C. L’applicabilité d’expériences menées à 350 °C pour accélérer les cinétiques et extrapoler le comportement à long terme des échantillons a également été investiguée.Des caractérisations multi-échelles, associées à des analyses d’images, des analyses spectroscopiques EDS et Raman, de la diffraction des rayons X, de la photoélectrochimie et des dosages d’hydrogène ont permis de proposer un mécanisme de corrosion et de quantifier les cinétiques de dissolution et de précipitation des produits de corrosion ainsi que l’absorption par le métal d’une partie de l’hydrogène issu de la réduction de l’eau.L’oxydation du titane conduit à la formation une couche de TiO2 continue (rutile et/ou anatase suivant les matériaux et les conditions) surmontées de cristallites (en TiO2 anatase et/ou Fe3O4 magnétite et/ou FeTiO3 ilménite selon les conditions).Le transport des défauts ponctuels à travers la couche d’oxyde continue consomme du métal et libère des hydroxydes de titane en solution. En milieu aqueux, seules les lacunes d’oxygène contribuent à la formation de la couche d’oxyde continue. La contribution des autres défauts dans le processus de corrosion ne doit néanmoins pas être négligée. La vitesse de corrosion est pilotée par celle des réactions de dissolution de l’oxyde et de complexation des espèces de titane, qui dépendent de l’écart à la limite de solubilité et donc de la vitesse de transport des ions dans la solution. La précipitation de l’ilménite à la surface des échantillons les protège de la corrosion. Les vitesses de corrosion et de prise d’hydrogène deviennent négligeables une fois la surface totalement recouverte d’ilménite. A 300 °C, ce recouvrement total intervient en environ 3500 h en autoclave et en seulement 200 h d’exposition avec une vitesse de fluide à 7,8 m/s. Dans le cas d’un système avec purification continue du milieu, cette couche peut néanmoins se dissoudre partiellement, du fait de l’entretien du déficit d’hydroxydes de titane en solution.A basse vitesse de fluide, la vitesse de corrosion des trois matériaux étudiés a été estimée à 1 µm/an à pH300 °C = 6,4, à 2 µm/an à pH300 °C = 7,2 et à 13 µm/an à pH350 °C = 7,7. Elle diminue lorsque le pH diminue alors que la vitesse de prise d’hydrogène augmente. Une façon de limiter le risque de fragilisation par l’hydrogène à température ambiante est d’augmenter le rapport surface/volume des pièces utilisées. L’élévation de 50 °C a accéléré les cinétiques par au moins un facteur quatre mais a entraîné l’apparition d’un phénomène inexpliqué d’épaississement d’oxyde pour le T40. S’il devient conséquent, les données acquises à haute température ne seront pas facilement extrapolables à plus basse température. La décorrélation entre l’effet du pH et de la température a été effectuée.L’augmentation de la vitesse du fluide a accéléré le transport de matière en solution et augmenté la vitesse de corrosion avant recouvrement total par l’ilménite. Celle-ci a été estimée entre 6 et 9 µm/an pour le T40 et entre 11 et 22 µm/an pour le TA6V/Ti10-2-3 à pH300 °C = 7,2. Dans ce régime, la prise d’hydrogène augmente avec la vitesse du fluide du même ordre de grandeur que la vitesse de corrosion