Peut-on habiter la ville décroissante ?

National audienceDetroit n'est pas la seule ville dans cette situation de décroissance urbaine, bien que son état actuel soit particulièrement unique et remarquable. Ces dernières décennies, d'autres villes de la Rust Belt aux États-Unis ont aussi fait parler d'elle. Citons ainsi les exemples de Buffalo, Cleveland, ou encore Pittsburgh et Youngstown. Elles ont, pour la plupart, perdu plus de 50 % de leur population depuis les années 1950 et se retrouvent avec des quartiers entiers délaissés. Plus proche de nous en France et dans le reste de l'Europe, différentes villes connaissent également, depuis les années 1970-1980, une période de décroissance urbaine. Certaines d'entre elles, comme Saint-Étienne, Liverpool ou Dessau, ont perdu près de 20 à 30 % de leur population. Mais cette entrée par Detroit est un prétexte pour revenir sur l'habitat, l'idée d' habiter et l'habitabilité des villes en décroissance, ainsi que sur la place des architectes et de l'ensemble des professionnels de l'aménagement de l'espace (paysagistes, urbanistes, urban designer, aménageurs, etc.) dans leur transformation. Bien qu'ils soient encore peu formés, ils ont un rôle primordial à jouer, d'autant plus aujourd'hui où la croissance urbaine n'est plus une certitude dans l'évolution des villes.Aujourd'hui se posent deux questions fondamentales aux concepteurs pour le devenir des villes en décroissance: comment faire face à cette situation, voire la dépasser (accepter et penser la décroissance) ? Comment permettre aux habitants restants de continuer à habiter la ville ? L'état dégradé de la ville tend à la rendre invivable et inhabitable et contribue au départ des activités économiques comme des habitants (effet boule de neige).Mon travail de recherche mené sur la fabrique urbaine et les pratiques de remodelage urbain dans les villes en décroissance au xxi siècle m'a permis d'identifier certains éléments de réponses. Habiter la ville en décroissance semble ainsi se décomposer en trois stades, tous liés à la manière dont les acteurs politiques comme les habitants décident d'intervenir sur leur habitat: cohabiter, survivre, revivre. Ils serviront de fil conducteur dans la suite de notre réflexion qui sera illustrée par des expériences observées en Allemagne et aux États-Unis