Le délire comme construction de soi dans une situation de présence à autrui

International audienceFor many years, I have been practicing attentive listening in mental health with the goal of supporting access to rights and recourses for people using a device that advocates an egalitarian relationship: pairadvocacy. This system mobilizes volunteers whose function is to enable the people requesting help to understand the situation in which they are living in difficulty. However, on a recurring basis, these volunteers can come up against a destabilizing situation when the person being listened to suddenly makes a speech that seems incoherent. It is then difficult for them, faced with this obstacle, not to interpret it as delirium, which refers to medical 'care'. The aim of support between equals, displayed by the device, is then reached: only a professional psychiatrist seems to be able to intervene. Delirium is then seen as the negative symptom of an illness.Contrary to this common interpretation, I have experimented with maintaining communication with many so-called delusional people. In the present text, I would like to develop three related hypotheses that would allow these listeners and people confronted with these delusional productions to benefit from them, understanding the contribution that maintaining communication with the delusional person can make to the construction of people. Thus, a communication activity, whatever the contents exchanged, is a fact that contributes to the transformations of the inter-communicating subjects (title of the biennial). This observation is transferable to other situations involving listening and listening and functioning as transformations. This account of experience is based on collected facts of which it proposes an interpretation and does not claim to account for the psychiatric categories characterizing the types of delusional productions in relation to a nomenclature of psychic illnesses.Depuis de nombreuses années je pratique l'écoute attentive en santé mentale dans le but de soutenir l'accès aux droits et recours de personnes faisant appel à un dispositif qui prône une relation égalitaire : la pairadvocacy. Ce dispositif mobilise des bénévoles dont la fonction est de permettre aux personnes demandeuses de comprendre la situation dans laquelle elles se vivent en difficulté. Toutefois, de façon récurrente, ces bénévoles peuvent se heurter à une situation déstabilisante lorsque la personne écoutée tient soudain un discours qui lui parait incohérent. Il leur est alors difficile, face à cet obstacle, de ne pas l'interpréter comme un délire, ce qui renvoie à une 'prise en charge' médicale. La limite du soutien entre égaux, affichée par le dispositif, semble alors atteinte : seul un professionnel de la psychiatrie semble pouvoir intervenir. Le délire est alors vu comme le symptôme négatif d'une maladie. Au contraire de cette interprétation commune, j'ai expérimenté le maintien d'une communication avec de nombreuses personnes dites délirantes. Dans le présent texte, je souhaite développer trois hypothèses liées de nature à permettre à ces écoutants et aux personnes confrontés à ces productions délirantes d'en tirer bénéfice, en comprenant la contribution que le maintien de la communication avec la personne délirante peut apporter à la construction de ces personnes. Ainsi une activité de communication, quelque soient les contenus échangés, est un faire qui contribue aux transformations des sujets inter-communicants (titre de la biennale). Constat transférable dans d'autres situations mettant en présence écoutants et écoutés et fonctionnant comme des transformations. Ce récit d'expérience s'appuie sur des faits collectés dont il propose une interprétation, et ne prétend pas rendre compte des catégories psychiatriques caractérisant les types de productions délirantes en lien avec une nomenclature des maladies psychiques