Renewing Hermeneutics. Thinking with Paul Ricœur; Renouveler l’herméneutique. Penser aver Paul Ricœur

L’intitulé d’un livre que Jean Greisch a édité en 1985, « l’âge herméneutique de la raison » convient parfaitement à définir le milieu culturel où l’œuvre de Paul Ricœur s’est déployée. Il y a au moins deux sens dont cet âge herméneutique pourrait être entendu : soit l’herméneutique comme ontologie fondamentale, soit l’herméneutique comme réflexion sur les méthodes dans les sciences humaines et singulièrement dans les sciences textuelles. La voie que Ricœur a tracée est une voie singulière, mieux appelée « voie longue », dans le conflit qui oppose ces deux orientations principales de l’herméneutique. Mais que signifie aujourd’hui « renouveler l’herméneutique » et pourquoi faire de l’œuvre de Paul Ricœur le point d’ancrage de cette interrogation ? Une de raisons en est justement la « voie longue » de Ricœur, car la diversité des thématiques (épistémologie, ontologie, politique, éthique, mémoire, justice…) qu’il a abordées au cours de sa trajectoire intellectuelle nous autorise à comprendre son œuvre comme un « chantier ouvert ». La voie dite longue ne se présente pas comme un rejet du « renversement ontologique » de l’herméneutique opéré par Heidegger et ses disciples qui font du comprendre un mode d’être plutôt qu’un mode de connaissance en vigueur dans les sciences humaines (exégèse, philologie, histoire…). Elle en propose une complication et un long détour. La voie trop courte de l’herméneutique ontologique ne permet pas de prendre à sa juste mesure les problèmes épistémologiques et méthodologiques posés par les sciences de l’interprétation. La voie longue que l’on peut qualifier d’onto-méthodologique, en tant qu’elle cherche à concilier les deux herméneutiques rivales, impose donc un retour au programme initié par Schleiermacher et surtout par Dilthey et corrélativement une investigation forte du côté des sciences interprétatives (les sciences textuelles et historiques feront l’objet d’un traitement majeur dans les trois tomes de Temps et récit (1983, 1984, 1985)). La voie longue se construit dans son œuvre autour de quatre grandes étapes, l’une étant à chaque fois un enrichissement de l’autre : l’herméneutique des symboles, l’herméneutique des textes, l’herméneutique de l’action, l’herméneutique de soi