Pour en finir avec le culturalisme juridique. A propos d'Ali Mezghani, L'Etat inachevé. La question du droit dans les pays arabes

Dans un livre joliment intitulé L'Etat inachevé et sous-titré La question du droit dans les pays arabes, le professeur Ali Mezghani (2011) entreprend d'étudier la question du rapport au droit en tant qu'elle serait le " grand impensé des les sociétés " arabo-musulmanes ". Partant du postulat que la normativité islamique est (et n'est que) droit et que cette normativité/droit est de part en part déterminante de l'ensemble des agissements des gens qui composent ces sociétés - une vision très holistique et organiciste de la société, sur un mode durkheimien - l'auteur s'attache à établir une connexion directe entre le fait juridique d'aujourd'hui et la période prophétique d'hier, sans qu'aucune " possibilité d'historicisation " ne soit dès lors possible et avec pour conséquence l'impasse sur les " piliers de la démocratie ". En fait d'impasse, cependant, c'est bien davantage celle que traduit ce livre sur la réalité du droit dans différents Etats dont une caractéristique est parfois ethnico-linguistique - l'arabité - et parfois socioreligieuse - l'islamité. Peu importe, semble-t-il, que l'immense majorité du contentieux traité par les cours et tribunaux de ces Etats ne renvoie, ni de près ni de loin, au référent islamique, l'affirmation est faite que le droit de ces pays est conditionné par la religion, qui plus est une religion incapable de toute herméneutique lui permettant d'être en prise avec le monde contemporain