La crucifixion du chevet : entre liturgie eucharistique et dévotion privée

À Poitiers, l'existence avérée d'un lien entre un vitrail du chevet et la fonction du lieu qu'il occupe constitue donc un premier fondement permettant d'envisager une lecture liturgique pour le vitrail central. Plusieurs auteurs ont déjà développé des interprétations de cet ordre en invoquant, non pas la dédicace de l'autel comme pour le vitrail de saint Laurent, mais certaines oraisons de la messe, une lettre d'Isaac de l'Étoile portant sur le canon ou encore le drame de Pâques. Si certains arguments avancés semblent à première vue recevables, ils ne suffisent pas toujours à établir ces différentes hypothèses. Il importe donc de reconsidérer la question en examinant l'oeuvre de plus près et surtout en prenant en considération la tradition iconographique dans sa longue durée. Celle-ci révèle en effet que les principaux thèmes assemblés sur le vitrail de Poitiers sont extrêmement récurrents dans le décor des espaces liturgiques et que quantité de programmes intègrent des indices iconographiques plaidant explicitement en faveur d'une lecture eucharistique. À l'examen des thèmes, du programme et des différents niveaux de lecture succèdera donc une analyse sérielle des peintures et des mosaïques des espaces presbytéraux entre le IVe et le XIIe siècle, des vitraux contemporains et enfin des vitraux du XIIIe siècle. Il faudra alors revenir sur le vitrail de Poitiers pour tenter d'en clarifier la portée à la lumière de ces comparaisons