Évolution de l'artisanat du verre en Bourgogne et Franche-Comté entre le Ve et le XIIe siècle

International audienceDepuis une quinzaine d'années, les recherches archéologiques sur le haut Moyen Âge se multiplient en Bourgogne et en Franche-Comté et alimentent, de ce fait, les collections de mobilier verrier. Désormais, nos connaissances sur cette période ne se limitent plus seulement aux données fournies par les contextes funéraires, contextes sur lesquels l’essentiel des travaux en matière de typologie sont basés. Plus d'une trentaine de sites d'habitat, répartis dans les deux régions, ont livré du mobilier verrier daté entre le Ve et le XIIe siècle. Le maillage des édifices religieux s'est également densifié avec la découverte de plusieurs églises paléochrétiennes et la mise au jour de niveaux de fondation mérovingiens et carolingiens dans les monastères.Le corpus disponible à l’étude a donc été considérablement enrichi, tant d’un point de vue quantitatif que qualitatif. Les collections se sont diversifiées et ne comprennent plus seulement des types du service à boire. Des lampes, des lissoirs, des verres à vitre, des éléments de vitrail et des indices d’artisanat complètent désormais la documentation. Ce travail, réalisé dans le cadre d'un Master recherche [1] à l'Université de Franche-Comté, a nécessité un inventaire exhaustif des collections disponibles dans la zone d'étude, anciennes comme récentes. Une étude archéométrique a ensuite été conduite à l’échelle macroscopique sur une sélection d’individus bien datés. En effet, la couleur et l’état de conservation de la matière vitreuse peuvent témoigner d’une composition élémentaire particulière et être rattachés à une famille chimique spécifique. Des groupes ont donc été constitués à partir de ces deux critères et vérifiés par analyses physico-chimiques. Un peu plus de quatre-vingt échantillons de tout type ont été envoyés pour analyse au Centre Ernest Babelon à Orléans (IRAMAT, UMR 5060, CNRS-Université d'Orléans). L'objectif de cette démarche était de déterminer l’évolution de l’artisanat verrier en Bourgogne et Franche-Comté entre le Ve et le XIIe siècle. Les recherches ont été axées sur le choix des matières premières selon leur destination et sur le changement de recette de fabrication observée à l’époque carolingienne. Plusieurs groupes de composition ont été identifiés parmi les verres au natron. Ces familles chimiques ont pu être rapprochées de celles reconnues par les travaux de D. Foy, M. Picon, V. Thirion-Merle et M. Vichy en 2003 [2]. Les datations de certains groupes ou séries diffèrent cependant de celles établies à partir du mobilier méditerranéen. Quant au passage du fondant minéral sodique au fondant végétal potassique, il s'opère entre le VIIIe et le IXe siècle selon les sites et le type de mobilier verrier. Ce changement de recette est précédé par une phase d'intensification de la pratique du recyclage, observée à partir du VIIe siècle. Des importations sporadiques de verre brut demeurent pourtant jusqu'à la fin de l'époque mérovingienne ou au début de l'époque carolingienne.Outre la mise en valeur de plusieurs collections méconnues ou inédites, cette étude sur un large intervalle chronologique a mis en évidence plusieurs phénomènes qui ont précédé ou succédé au passage du natron aux cendres végétales, dans deux régions jusqu'alors peu étudiées.[1] Master Archéologie, Cultures, Territoires, Environnement sous la direction de Pierre Nouvel (Maître de conférences, Université de Franche-Comté) et de Claudine Munier (Service municipal d’archéologie préventive de la ville de Besançon).[2] FOY (D.) et al., Caractérisation des verres de la fin de l'Antiquité en Méditerranée occidentale : l'émergence de nouveaux courants commerciaux, In : FOY (D.), NENNA (M.-D.) dir., Échanges et commerce du verre dans le monde antique. Actes du colloque de l'Association Française pour l'Archéologie du Verre, Aix-en-Provence et Marseille, 7-9 juin : 2001, Montagnac, Editions Monique Mergoil, 2003, p. 41-85 (Monographie Instrumentum, 24