Syndrome de Détresse Respiratoire Aigu chez le militaire en opérations extérieures : étude rétrospective des blessés évacués sur une période de 15 ans

Objectif : le Syndrome de Détresse Respiratoire Aiguë (SDRA) est une pathologie fréquente en réanimation qui reste grevée d’une mortalité élevée de 20 à 40%. Selon le JTTS (Joint Theater Trauma System), cette pathologie est fréquente chez le blessé de guerre (30%): traumatisme pulmonaire direct pénétrant, blast, brulure, transfusion massive, syndrome de réponse inflammatoire systémique majeur post traumatique concourent au développement du SDRA. Cependant, aucune donnée concernant le militaire français en opération extérieure n'est disponible. L'objectif de notre étude est de décrire l’incidence et la sévérité du SDRA chez le militaire français déployé en opération extérieure.Matériels et méthodes : il s’agissait d’une étude observationnelle multicentrique rétrospective incluant tous les patients évacués d’un théâtre d’opération extérieure admis en service de réanimation et développant un SDRA selon la définition de Berlin. L’étude a été approuvée par le comité d’éthique local. Le critère de jugement principal était le développement d’un SDRA. Les critères de jugement secondaires étaient la sévérité du SDRA, la durée de ventilation mécanique, la durée de séjour en réanimation, la nécessité de traitement adjuvant du SDRA, la mortalité.Résultats : entre octobre 2003 et février 2018, 141 patients évacués d’OPEX ont été admis en réanimation. Cinq patients ont été exclus. Au total,136 dossiers ont été analysés. L’incidence du SDRA était de 42% (n=57). 84% (n=48) étaient des militaires âgés de 30 ans [25-36]. L’IGSII médian était de 39 [24-63]. Pour les patients traumatisés sévères, l’ISS médian était de 34 [27-44]. Treize (23%) patients ont développé un SDRA mineur, 24 (41%) un SDRA modéré et 20 (36%) un SDRA sévère. Nous retrouvions 86% (n=49) des SDRA chez des traumatisés sévères: 57% (n=32) après blessures de guerre, 29% (n=17) après blessures non liées à un fait de guerre (AVP et chute principalement) et 14% (n=8) étaient liées à une pathologie médicale. Le délai médian d’évacuation était de 26 heures [24-48]. A l’admission en réanimation, le rapport PaO2/FiO2 médian était de 244 [141-296], avec un nadir au 4e jour : 194 [156-249]. Tous les patients étaient intubés ventilés. Les traitements adjuvants utilisés au cours de la prise en charge en réanimation était : la curarisation (76%), le décubitus ventral (16%), le monoxyde d’azote (10%), l’almitrine (7%). L’ECMO a été nécessaire chez 2 patients (4% des cas). La durée de médiane de ventilation mécanique était de 12 jours [6-26]. La durée médiane de séjour en réanimation est de 18 [9-33] jours. La mortalité était de 21% (n=12) à 3 mois.Conclusion : sur la base de cette étude, le SDRA chez les blessés évacués de théâtre d’OPEX survient chez 42% des patients admis en réanimation. Ces données sont en cohérence avec les résultats publiés dans la littérature issue du JTTS. Les caractéristiques du SDRA survenant en OPEX permettent de poser la question de l’adéquation des moyens techniques mis à disposition par rapport au besoin à l'avant. Il existe un modèle d’équipe spécialisée dans la prise en charge du SDRA et déployable à la demande sur les théâtres d’OPEX : il s’agit de l’équipe ALerT (Acute Lung Rescue Team) crée par le service de santé américain