Adoption internationale (les revenants de Corée)

Naguère considérés par les Coréens comme des orphelins victimes d'un trafic d'enfants commence après la guerre, lés adoptés d'origine coréenne sont aujourd'hui accueillis par le gouvernement sud-coréen comme les membres éduqués de la diaspora, garants d'une globalisation réussie. Leur statut dans la société coréenne reste pourtant ambigu comme le montre l'organisation de l'émission hebdomadaire Ach'im matang sur la chaîne nationale qui valorise leur éducation tout en les faisant apparaître aux côtés d'orphelins coréens et d'émigrés qui paraissent tous souffrir de l'absence des liens du sang, de l'école, ou du sol. Ce programme populaire tend à réintégrer les trois groupes dans une communauté de sang, de goût et de sentiments que le discours normalisant des présentateurs crée à partir des souvenirs d'enfance et des dessins des participants coréens. Les liens de l'école et du sol semblent reconstitués quand les adoptés étrangers reçoivent au terme de programmes culturels de quelques semaines organisés par des agences d'adoption ou par le gouvernement depuis les années 90 des diplômes et un certificat de citoyenneté d'honneur les rattachant à une municipalité de Séoul. Les retrouvailles larmoyantes, elles, semblent signaler la reconstitution du lien du sang, mais la scène préfigure plutôt la réunification de la nation : journalistes, politiciens et gens du commun considèrent en effet la guerre et la séparation des deux Corée comme les causes directes et involontaires de la séparation familiale. Les cas présentés à Ach'im matang dévoilent toutefois des pratiques de séparation ou de circulation enfantine dans les familles pauvres, nombreuses ou monoparentales Si l'abandon était définitif, le fosterage, l'adoption, la mise en gage, ou l'envoi à l'orphelinat étaient souvent envisagés comme des solutions temporaires, parmi lesquelles figure aujourd'hui l'adoption internationale. En l'absence des pères, les retrouvailles échouent le plus souvent à reconstituer la parenté dans cette société confucéenne patrilinéaire où la recomposition familiale est encore une exception. Pourquoi dès lors les parents remariés - particulièrement les mères - acceptent-ils de jouer ces scènes dramatiques vouées à l'éphémérité ? Notre hypothèse est que l'enfant perdu ou abandonné est assimilé dans ce contexte à un potentiel mauvais mort dont il faut, comme dans le rite chamanique, pacifier les sentiments hostiles. Le programme télévisé apparaît dès lors comme un rite d'intégration inversé dont le but est de séparer plutôt que de réunir.Discarded alter the war and left at the hands of foreign aid, foreign adoptees born in Korea got to be seen as orphans. victime of baby traffic in the last 80s, when international adoption decupled. Objecte of national shame then, they are called today successful members of the Korean diaspora in the age of globalization. This lasting ambiguity is illustrated by the way Ach'im matang, a popular weekly family reunion television show on KBS (national charnel), valorizes young foreign adoptees' achievements while staging them with older Korean orphans and emigrants. All three groupe are marginal since they Jack fondamental blond, school and soil ties. Out of participants' memories, village maps and drawings, the hosts recreate the part, the countryside, the village, ideal time-space where conservative values of eider generations reigned. The hosts integrate the participants in a community they build by focusing on physical similarities, 'common tartes of fond and common blond. Foreign adoptees' integration to Korean society is pushed further by sommer !cultural programs organized every year since the 90s by adoption agencies, adoptees' organization or the government. On one hand, participants' school and soil ties are recreated by sommer schools certificates and honorary citizenship, which attach them to a district. On the other hand, the dramatic family reunion seems to recreate the blond tie but in fact is rather a symbol of the two Koreas unification: politicians, journaliste or scholars, ail interpret family separation as the direct consequence of the war, as a tragic event which occurred against people' will. The show evokes war but rather emphasizes "practices" of separation or children circulation: children were fostered by relatives or strangers, sent as labor force in rich houses, raised in orphanages or abandoned. Separations were often voluntary but sien temporary solutions mostly for poor, numerous or single parent familier. Today international adoption is often considered the rame way. As fathers never appear on the show reunions are fragile. Mort of family ties expressed at Ach'im matang do rot create kinship. Moreover, in spite of a high rate of divorce, South Korea shows no recomposed families. So why does a~ remarried parent who knows the tie cari be, accept to perform the reunion? Our hypothesis is that lost and abandoned children are regarded as potential inauspicious dead. Parents or the state must fend and turn them into auspicious beings through appeasing rituals, words and offerings. And reintegration rites turn out to be separation rites, which, like shamanistic rituals, aim to leave both rides in peace.NANTERRE-BU PARIS10 (920502102) / SudocSudocFranceF