MARE NOSTRUM : L'ADRIATIQUE, L'ITALIE ET LES BALKANS. LE CAS DE L'ALBANIE

International audience“Italian colonies”: people think about the African ones, Libya and Ethiopia. It is almost unknown that Italy was also in the Balkans, with forced territorial annexations, and these conflicts had more consequences on the country than African colonisation.From the historical point of view, the Romanization of the Balkans is ancient and lasting (229 BC – 395 AC). After the fall of the Eastern Roman Empire, the Republic of Venice began to expand in the Adriatic, and in the 10th century it conquered the entire Dalmatian coast. Venice was at the heart of a huge system of movement of goods and men, and control the trading places of the Near and Middle East, of the Eastern Mediterranean and also of Europe, so the economic issues of its expansion are clear. Over the centuries, Istria, Dalmatia, Montenegro, the Ionian Islands, many Greek and Turkish ports, “Venetian” Albania, Crete, Cyprus, have been part of his possessions. Venice dominated all the eastern Adriatic until the Napoleonic era.It was because of this “historical belonging” of the Balkans to an “Italian” republic that bloody fighting took place throughout the twentieth century, in particular because of Istria and Trieste. The Adriatic Sea was the axis of Italian colonial claims on the Balkans. Mare nostrum: this sea belongs to us, and its seaboard too.We will especially see the case of Albania, Italian protectorate from 1914 to 1920 and annexed by the Fascist in 1939. King Zog (1928-1939), a very controversial figure, was considered a puppet of the Italians, and he actually seemed to be pursuing a policy dictated by Rome. When the Italians occupied Albania in 1939, they call it “protectorate”, but Victor Emmanuel III (who had married a Balkan princess, Jelena of Montenegro, and was king of that country from 1941 to 1943) had received the title of “King of Italy and Albania”, which demonstrates that it was indeed a colonization. This long semi-colonial history has left an indelible mark in both countries, and is no stranger to the great wave of Albanian migration to Italy since the 1990sQuand on parle de « colonies italiennes », on pense d’emblée à l’Afrique, Lybie et Ethiopie. On ne se souvient presque jamais que l’Italie a été aussi dans les Balkans, avec des annexions territoriales forcées, et que ces conflits ont étés plus lourds de conséquences que les campagnes coloniales africaines.Du point de vue historique, la romanisation des Balkans est ancienne et a duré longtemps (229 av JC - 395). Après la chute de l’Empire Romain d’Orient la République de Venise commence son expansion en Adriatique, et au Xe siècle elle avait conquis toute la côte dalmate. Venise était au cœur d’un énorme système de circulation de marchandises et d’hommes : elle dominait sur les places commerciales du Proche et Moyen-Orient, de la Méditerranée orientale et aussi d’Europe, on comprend donc les enjeux de son expansion balkanique. Au fil des siècles, ont fait partie de ses possessions l’Istrie, la Dalmatie, le Monténégro, les îles Ioniennes, nombre de ports grecs et turcs, l’Albanie « vénitienne », la Crète, Chypre... Elle a dominé sur l’Adriatique oriental jusqu’à l’époque napoléonienne. C’est à partir de cette « appartenance historique » des Balkans à une république « italienne » que se sont joués des combats sanglants tout au long du XXe siècle, notamment à cause de l’Istrie et de Trieste, territoires à majorité linguistique italienne et noyaux des revendications trahies (Vittoria Mutilata) lors de la Grande Guerre. L’Adriatique était l’axe des revendications coloniales italiennes sur les Balkans. Mare nostrum : cette mer nous appartient, donc ses rivages aussi.Nous examinerons plus en détail le cas de l’Albanie, protectorat italien de 1914 à 1920, annexée par le régime fasciste en 1939. Le roi Zog (1928-1939), figure très controversée, était d’ailleurs considéré une marionnette des Italiens, et il semblait effectivement mener une politique dictée par Rome. En 1939 on parlait encore de protectorat lors de l’occupation italienne, mais Victor-Emmanuel III (qui avait épousé une princesse balkanique, Jelena du Monténégro, et fut roi de ce pays de 1941 à 1943) avait immédiatement reçu le titre de « roi d’Italie et d’Albanie », montrant qu’il s’agissait effectivement d’une colonisation. Cette longue histoire semi-coloniale a laissé une trace indélébile dans les deux pays, et n’est étrangère à la grande vague de migration albanaise vers l’Italie qu’on connait depuis les années 1990