Le compostage et la fertilisation organique à l’échelle du territoire en Guadeloupe: conditions d’émergence d’une filière de recyclage des déchets en agriculture

Établissement d'inscription : Institut des Sciences et Industries du Vivant et de l'Environnement (AgroParisTech) 125 p. + ann. Thèse de doctorat 2017SACLA028The reduction and recycling of waste produced by human activities (domestic, agricultural and industrial) are a major challenge for the sustainable development of the archipelago of Guadeloupe. Due to the limited availability of landfill sites, local authorities have strongly encouraged since 2008 the structuration of waste treatment channels. As concerns the organic wastes, a special attention has been paid for recycling them through composting and the encouragement of farmers to apply composts in their fields. In this study, we focused on the conditions of development of a sector for recycling organic wastes in Guadeloupe through the assessment of the conditions affecting compost adoption by farmers. In order to identify and evaluate the determinants of farmers 'choices, we applied an original approach combining an ex-post analysis of current practices and farmers' perceptions, and an ex-ante analysis of levers for facilitating the adoption of compost. The goal of the ex-post analysis (literature review, analysis of compostable waste resources, initial diagnosis following a survey of 520 farmers) was to identify and prioritize the constraints and levers of action. The ex-ante analysis was devoted to test the ability of identified levers to increase farmers’ willingness to adopt organic amendment with compost. To this end, we revealed the declared preferences of 305 farmers using the Choice Experiment method to test biotechnical and economic levers. The first concerned compost properties and the facilitation of practices with technical support. The second was mainly focused on the implementation of new Agro-Environmental Schemes (AES) to promote economically the composts. In the first chapter, we analyse the use of composts in tropical countries through a literature review. This analysis showed that the adoption rate is frequently less than 50% and that the major determinants of adoption are rather socio-economic than agronomic. In the second chapter we assessed the available resources of organic wastes in Guadeloupe and calculated the potential production of composts, which is four times greater than the current consumption by farmers. This removes from our analysis an eventual constraint related to supply limitation. Chapter 3 reports the results of the ex-post analysis of the assessment of the current rate of compost adoption. We observed that the adoption rate is relatively low (18% of farmers) and highly dependent on the agricultural sector (i.e. banana, sugarcane, vegetables and food crops), the socio-economic characteristics of the farmers and the lack of organization of the waste recycling chain (e.g., information, transport, spreading, subsidies). The results indicated strong differences between farmers concerning their practices and perceptions concerning compost use, which allowed us to identify levers of action adapted to each farmer type. Such topic is developed in Chapters 4 and 5, where we apply an ex-ante evaluation of farmers' preferences using the Choice Experiment method. We demonstrated that farmers are very sensitive to the improvement of compost quality by increasing its fertilizer value, as well as to the logistical, economic and administrative support for its transport and spreading. They are also willing to participate in a collective incentive in the form of a conditional monetary bonus paid individually to farmers. The results of this study indicated that farmers are not reluctant to a regular use of compost provided that organizational barriers identified are removed, and that the agronomic value of the composts meets the expectations of farmers. Regional plans can now be defined and implemented to develop the massive use of compost from the recycling of organic waste in Guadeloupe.En Guadeloupe, la réduction et le recyclage des déchets produits par les activités humaines sont (domestiques, agricoles et industrielles) un enjeu majeur du développement durable de l’archipel. Depuis 2008, les autorités locales ont fortement encouragé l’organisation des filières de traitement des déchets. En ce qui concerne les déchets organiques, une voie privilégiée de valorisation est le recyclage en compost et l’orientation des agriculteurs vers l'utilisation des composts pour amender et fertiliser les sols tropicaux dégradés. Dans cette thèse nous étudions les conditions d’émergence d’une filière de recyclage des déchets organiques du territoire à travers l'analyse des conditions d'adoption de la pratique d’utilisation de composts par les agriculteurs. Nous nous appuyons sur une approche originale combinant une analyse ex post des pratiques actuelles et des perceptions des agriculteurs et une analyse ex ante de leviers visant à favoriser l’adoption des composts. L’analyse ex post nous permet d’identifier et de hiérarchiser les contraintes et les leviers d’actions possibles à l’utilisation de compost (revue de la littérature, analyse des gisements de déchets compostables, diagnostic initial). L’analyse ex ante de leviers d’adoption nous permet ensuite de tester les leviers identifiés à travers une révélation des préférences déclarées des agriculteurs en utilisant la méthode du Choice Experiment. Nous testons des leviers d’ordre biotechniques concernant les propriétés des composts et les modalités de leur utilisation, et des leviers d’ordre économiques à travers des Mesures Agro-environnementales et Climatiques (MAEC), afin de proposer aux décideurs politiques des leviers d’actions pertinents. Nous analysons dans un premier chapitre l'utilisation des composts dans les pays tropicaux au travers d’une revue de la bibliographie, qui a montré que le taux d'adoption est fréquemment inférieur à 50% et que les déterminants de l’adoption sont davantage d’ordre socio-économique qu'agronomique. Dans un deuxième chapitre nous réalisons une analyse des gisements des déchets organiques et nous estimons que la production potentielle des composts en Guadeloupe est quatre fois supérieure à la consommation actuelle, ce qui enlève de notre analyse la contrainte liée à la limitation de l'offre. Le chapitre 3 rapporte les résultats d’une analyse ex-post concernant l'évaluation du taux d'adoption actuelle du compost à partir d’une enquête auprès de 520 agriculteurs. Nous constatons que le taux d’adoption est faible (18%) et dépend fortement de la filière agricole, des caractéristiques socio-économiques des agriculteurs et du manque d'organisation de la filière de recyclage des déchets (p.ex. information, transport, épandage, subventions). Ces résultats nous permettent d'une part d’identifier des leviers pour accélérer l'adoption et d'autre part, nous montrent que ces leviers doivent être déclinés et analysés par filière agricole, vu la grande disparité de pratiques et de perception à l’égard du compost selon l’orientation productive de l’agriculteur. Ces aspects sont traités dans les chapitres 4 et 5, où nous appliquons une démarche d’évaluation ex ante des préférences des agriculteurs en utilisant la méthode du Choice Experiment. Nous montrons à partir d’une deuxième enquête ciblant 305 individus que les agriculteurs sont sensibles, sur le plan biotechnique, à une amélioration de la valeur fertilisante des composts ainsi qu’à un accompagnement logistique pour son transport et son épandage et, sur le plan économique, à la mise en place d’un dispositif d’accompagnement administratif et à une incitation collective sous la forme d’un bonus monétaire conditionnel versé individuellement aux agriculteurs. Dans l'ensemble, les résultats de ce travail montrent que les agriculteurs ne sont pas réfractaires à une utilisation conséquente et régulière du compost, à condition que les verrous organisationnels que nous avons identifiés soient levés, et que la valeur agronomique des composts répond aux attentes des filières agricoles. Des plans de développement peuvent maintenant être définis et mis en oeuvre à l’échelle du territoire pour développer l’utilisation massive de composts issus du recyclage des déchets organiques du territoire