Propriétés comportementales et neurales des effets d'anticipation conscients et inconscients

Tandis que les psychologues débattent depuis longtemps la question du conscient et de l’inconscient pour savoir lequel a le plus d’influence sur le comportement humain, une approche plus fructueuse serait d’explorer comment ces deux aspects fonctionnent ensemble. En effet, les recherches récentes montrent que les liens entre les processus conscients et inconscients sont si étroits qu’il serait quasi-impossible d’avoir une compréhension générale de l’appareil psychique humain sans comprendre leurs interactions. De plus, la conscience semble être nécessaire pour qu’une représentation mentale puisse être maintenue et accessible à divers processus cognitifs tels que le contrôle stratégique ou la mémoire épisodique. Plusieurs expériences comportementales et d’imagerie fonctionnelle montrent que les représentations inconscientes sont typiquement de très courte durée. Toutefois, nous avons émis l’hypothèse que ces représentations inconscientes éphémères pourraient également provoquer des processus de plus longue durée, comme le suggère l’observation récente de préparations motrices et attentionnelles pouvant être manipulées inconsciemment. Ceci nous a poussé à explorer si l’attente d’un stimulus visuel imminent – qui sollicite des processus moteurs et attentionnels – est modulée par des processus inconscients. Ainsi, nous avons développé une série d’expériences d’amorçage masqué pour explorer la possibilité d’initier inconsciemment un effet d’attente soutenue. A travers quatre expériences complémentaires qui utilisent des mesures comportementales, de l’EEG à haute densité ou des enregistrements intra-crâniaux, nous démontrons qu’un signal perçu inconsciemment peut moduler un composant ERP (la variation contingente négative, CNV) de longue durée (>1 seconde) et que cet effet d’attente neurophysiologique va de pair avec une facilitation comportementale. Ces résultats soulignent l’importance de distinguer les représentations inconscientes éphémères de la possibilité d’une influence de plus longue durée sur les processus cognitifs. Les résultats iEEG ont mis en lumière une dissociation entre les effets conscients et inconscients. Nous trouvons des effets précoces comparables dans les régions temporales pour les signaux conscients et inconscients, suivis par des effets frontaux de longue durée uniquement pour les effets conscients. Ces résultats convergent vers un modèle en deux étapes des mécanismes sous-jacents de l’attente.While psychologists have long debated whether it is consciousness or unconsciousness that has a stronger hold on human behavior, a more fruitful endeavor is to explore how they work together. Recent research has shown that the links between conscious and unconscious processing are so extensive that it is almost impossible to get a complete picture of mental life without understanding their interactions. In this work, our main goal was to understand to which extent unconscious processing influences conscious representations, and impacts behavior. Furthermore, consciousness appears to be required for a representation to be actively maintained, and flexibly accessed, to most cognitive processes including strategic control and episodic memory. In several experiments, unconscious representations observed both with behavioral and functional brain-imaging tools are typically very short lived. However, we hypothesized that such vanishing unconscious representations may still elicit long-lasting processes. Indeed, recent research has shown that attention and motor preparation can be manipulated unconsciously. This led us to explore whether expectancy of an upcoming visual stimulus, which engages both attentional and motor processes, can be triggered by unconscious processes. To this aim, we designed a series of masked cueing experiments in which we explored the possibility of initiating unconsciously a sustained expectancy effect. Through four complementary experiments using behavioral measures, high-density EEG and intra-cranial recordings, we demonstrate that an unconsciously perceived visual cue can modulate a long-lasting (>1 second) event related potential (ERP) component (the contingent negative variation, CNV) and that this neurophysiological expectancy effect has a behavioral counterpart. These results underline the importance of distinguishing a fast decaying unconscious representation, from its possible long-lasting influences on cognitive processes. The iEEG results also revealed a dissociation between conscious and unconscious effects. We report early effects in temporal regions similar for conscious and unconscious cues, followed by late and sustained frontal effects for the conscious effects only. Taken together, these results converge towards a two-stage model of the underlying mechanisms of expectancy