Esthétique(s) de la répétition dans la conception architecturale

La répétition, reproduction délibérée et organisée de mêmes objets et/ou de mêmes dimensions dans l’espace est un phénomène (ou notion), une opération (ou figure), qui prend de multiples formes. Pour tous, historiens de l’architecture et historiens de l’art, la répétition renvoie à la typification et au débat sans fin sur le type et le modèle en architecture. Mais il est une répétition sensible, symbolique, éminement plastique qui prend corps en tant que telle, lorsqu’elle s’offre toute entière au regard, dans le champ de l’espace défini par le projet lui-même. Elle est le fait, plus ou moins conscientisé de l’architecte qui choisit délibéremment de reproduire les mêmes objets, les mêmes dimensions, de les organiser selon certains rythmes et de les délier de certaines variations. Ce travail s’observe à différentes échelles spatiales : façade, immeuble, ensemble d’immeubles… Les expressions, les règles et les conditions de la répétition varient selon les époques : intégrée aux règles de composition de l’enseignement des Beaux-Arts jusqu’au milieu du XXe siècle, elle permet d’atteindre l’unité. Exacerbée puis rejetée au XXe siècle avec la production industrialisée, elle répond au double enjeu d’égalitarisme social et de rationalisation (normalisation) de la construction. Enfin, la répétition continue d’exister à travers les différentes injonctions à la diversité. Ainsi, à quel point peut-on parler d’une esthétique de la répétition en architecture ? À quel moment l’action (répéter) s’incarne t-elle en un matériau répétition et devient-elle plastique ? En quoi la lecture de cette identité plastique renvoie t-elle à des valeurs sociétales plus larges ? En partant de nos travaux sur la répétition dans le projet de l’habitation collective, nous présenterons, dans un premier temps, les conditions de son incarnation plastique dans le processus de conception. Ceci en identifiant les différentes figures rhétoriques de la répétition et leurs champs de variation. Dans un second temps, nous verrons, à partir de quelques exemples issues des trois périodes énoncées, en quoi les figures de la répétition choisies par les architectes, renvoient à des facteurs tantôt esthétiques, sociaux, techniques ou symboliques et inscrivent ainsi le bâtiment dans son temps