La destination du père de famille: un aménagement au potentiel effet créateur et extinctif de servitude

Le Code civil traite de la destination du père de famille aux articles 692 à 694, trois dispositions inchangées depuis 1804, figurant dans une section consacrée aux modes d’établissement des servitudes, elle-même située dans un chapitre consacré aux servitudes établies par le fait de l’homme. La destination du père de famille, aménagement particulier que pratique sur son fonds un propriétaire en vue d’accroître l’utilité ou la valeur d’une partie de ce fonds ou celle d’un autre fonds lui appartenant, peut en effet déboucher sur la création d’une servitude. La contribution examine les conditions requises pour que création il y ait, étant entendu que celle-ci est une valse à deux temps. Au premier temps de la valse, on trouve l’établissement d’un état de fait, l’aménagement particulier ; posant un acte d’aménagement de son fonds ou de l’un de ses fonds, le propriétaire ne fait en réalité qu’exercer son droit de propriété. Mais si les fonds ou parties de fonds ne devaient plus ressortir du même patrimoine, autrement dit en cas de séparation juridique des fonds ou de division juridique du fond, et à partir du moment où tel serait le cas, une servitude pourra voir le jour et être opposée aux tiers sans transcription, la destination du père de famille valant alors titre, selon l’expression utilisée dans l’article 692 du Code civil. C’est le deuxième temps de la valse. Présenter l’établissement des servitudes par destination du père de famille comme une valse à deux temps, requérant que soient remplies certaines conditions, ne doit toutefois pas faire oublier que si, au deuxième temps, celui de la séparation des fonds ou de la division du fonds, peut effectivement naître une servitude continue et apparente, tel ne sera pas toujours le cas. L’affectation préalablement établie, parfois de longue date, peut en effet être effacée au moment de la division des fonds. Sur ce point, la Cour de cassation a récemment rappelé quelques règles dans un arrêt du 25 mars 2013