L’évaluation des compétences : analyse des processus en contexte

L’évaluation des compétences est le but de pratiques extrêmement diversifiées en contexte professionnel. Certaines approches, telles que le centre d’évaluation (Arthur et al., 2003) ou l’évaluation des traits personnels ou compétences comportementales génériques (Bartram, 2005), sont étayées par des études scientifiques robustes attestant notamment de leur validité prédictive. D’autres, telles que le portfolio de compétences ou l’entretien d’appréciation, sont avant tout portées par l’expérience pratique et s’inscrivent dans une approche plus constructiviste du sujet évalué et de sa relation à l’emploi. Bernaud (1999), notamment, a déjà proposé une catégorisation de ces pratiques selon la définition de la compétence retenue et leur finalité d’usage. Beaucoup de questions subsistent néanmoins quant à leur légitimité et à leur efficacité. L’objectif de la présente communication est de poursuivre ce travail d’intelligibilité de ces pratiques et instruments en les situant dans leur contexte. Considérant que les instruments émanent d’une construction sociale, nous les analysons à la lumière du processus et du contexte organisationnel dans lequel ils s’inscrivent. Cette analyse repose sur sept études de cas d’entreprises contrastées en place des pratiques d’évaluation des compétences dans le cadre plus large d’une politique de gestion des compétences. Dans chaque organisation, quatre entretiens ont été menés avec le responsable RH et avec des représentants du management et du personnel. Les documents internes, en particulier les référentiels et grilles d’évaluation du personnel, ont également été analysés. L’analyse comparative des contextes organisationnels et modèles de GRH dominants, des processus de gestion des compétences déployés et des instruments mis en place pour évaluer les compétences nous ont conduits à proposer quatre modèles distincts de gestion et d’évaluation des compétences : un modèle « valoriel » centré sur des comportements partagés à large échelle et visant l’homogénéisation culturelle, un modèle « professionnel » centré sur l’expertise technique et la livraison de prestations à haute valeur ajoutée, un modèle « polyvalent », centré sur des savoir-faire opérationnel et visant une allocation flexible des ressources humaines au sein d’un périmètre d’activité et un modèle « responsabilisant » faisant des qualités et aptitudes individuelles génériques la clé de la performance individuelle et collective. Outre l’objet évalué, ces modèles se distinguent quant au rôle des acteurs impliqués dans le développement et l’usage des pratiques d’évaluation, quant au contenu technique de ces pratiques et quant aux décisions découlant de l’évaluation. En resituant les pratiques d’évaluation du personnel dans leur contexte, cette modalisation nous permettra de clarifier les enjeux prioritaires des pratiques d’évaluation du personnel et, dès lors, de définir les critères de légitimité, de qualité et de pertinence des ces pratiques