Matière vivante et nature figurée. Représentations de la nature vivante dans les ouvrages scientifiques du XVIIIe siècle

A l'aube des Lumières la réflexion métaphysique sur la nature se trouve relayée par une nouvelle théorie de la matière vivante qui sous-tend un intérêt vers la nature « en personne », avec ses produits et ses formations organiques considérées dans leur caractère concret, à l’aune de la nouvelle méthode expérimentale, qui s’accompagne à goût spécial pour la description et la classification. A partir du grand débat sur l'âme des bêtes, à la moitié du XVIIe siècle – débat qui portait précisément sur l'âme, c.-à-d. une faculté supérieure, non pas sur le corps animal et sa structure concrète, le comportement, l'action etc. -, pour terminer avec les différentes «merveilles de la nature» et les nombreux « spectacles » qu'offraient les apologistes, au tournant du XVIIe siècle (J. Swammerdam, B. Nieuwentijt, N.-A. Pluche etc.), c'est encore l'aspect de la simple contemplation de l'univers créé qui l'emporte. Au XVIIIe siècle les représentations figurées de la nature vivante connaissent un changement de style considérable, lié à l'affirmation du travail des médecins, des premiers naturalistes scientifiques et des philosophes matérialistes aussi. Notre propos est de suivre les principales éditions d'ouvrages scientifiques du XVIIIe siècle en France qui ont pour objet la nature vivante, et d'analyser la manière différente, non contemplative, de représenter, en images, l'univers des organismes, passant par la confrontation avec les textes/images apologétiques de la même époque. Nous examinerons, dans ce contexte, le rôle qu'a eu le «paradigme matérialiste» – nous expliquerons le sens de cette expression – dans la définition des frontières méthodologiques des nouvelles sciences de la vie