LES TERRES CUITES DES SALINES DE KITION : ETUDE D'UN CULTE CHYPRIOTE D'EPOQUE CLASSIQUE

L'étude porte sur un ensemble de terres cuites trouvées lors de fouilles anciennes menées au XIXe siècle sur les bords du lac salé de la ville moderne de Larnaca, à Chypre. La découverte est composée de plus de 400 figurines datant surtout du IVe siècle av. J.-C., aujourd'hui dispersées entre différents musées européens et américains (principalement le Louvre, le British Muséum et le Metropolitan Muséum de New York). Grâce à une recherche rigoureuse sur le dépouillement d'archives d'époque, l'auteure en reconstitue le corpus et précise l'origine des objets. La recherche approche aussi les aspects techniques et archéologiques liés à la production des statuettes en détaillant finement les caractéristiques de facture et de production des terres cuites. Celle-ci révèle les procédés dont usent les coroplathes de Kition et précise les contours de l'artisanat de l'argile dans la cité chypro-phénicienne. La thèse s'intéresse également aux modalités régissant l'utilisation des images en contexte rituels et met à jour le processus d'adaptation de types iconographiques attiques, qui sont modifiés localement afin de permettre aux statuettes de s'intégrer dans les cultes locaux. L'auteure propose, par le biais de l'analyse des images, une nouvelle étude des cultes d'époque classique à Kition qui permet de préciser les contours de l'archéologie religieuse et de cerner d'avantage les divinités honorées dans la cité. La thèse questionne la présence aux Salines de la déesse grecque Aphrodite, mais aussi de dieux d'origine phénicienne ou égyptienne comme Astarté, Eshmoun-Melqart et Bès, ainsi qu'une divinité appelée Umm (« Mère »). La présence durable de cette déesse maternelle et son association avec un dieu aux traits grotesques protégeant la parturition encouragent à identifier aux Salines un culte tourné vers la protection de la fécondité de la terre et des Hommes, qui comprenait aussi la santé de la future mère et du nourrisson. La thèse démontre l'interaction existant entre l'environnement marin, où s'établit le culte, et le caractère de divinités qui sont associées aux emplois thérapeutiques du sel, exploité sur place. Enfin, le travail interroge la dimension culturelle et rituelle liée au sel et à la mer dans le paysage religieux chypriotes, phéniciens et levantins, ainsi que l'importance historique du développement des cultes dans le royaume de Kition au IVe siècle av. J.-C. UNIL | Université de Lausann