« Des figures pour une musique désaccordée de l’amour »

Comment raconter le « bal masqué » d’un sentiment amoureux total et totalisant qui ne trouve pas de correspondance dans son « objet » et se heurte au « jeu de miroir » représenté par une double confusion sexuelle ? Comment rendre compte du désespoir d’un « moi » qui se perçoit comme une « musique désaccordée » à l’intérieur d’un univers qui semble étranger et indifférent à toute souffrance et qui parvient, pour cela, à envisager de se suicider ? Comment, sinon à travers une écriture syncrétique, comme celle que Marguerite Yourcenar choisit pour Feux, moulée dans les figures de styles les plus diverses, à même d’absorber, dans son architecture compositionnelle et stylistique, la densité et la complexité du sentiment amoureux, l’hallucination de son parcours malheureux, la profondeur de son questionnement existentiel et philosophique. La richesse et l’originalité stylistique de Feux, sa difficulté de classement, avertie par Yourcenar elle-même, inspire, dans cette communication, une réflexion sur les modalités de construction du discours, les constellations d’images et les formes stylistiques de représentation par lesquelles Marguerite Yourcenar parvient à maîtriser cette matière « brûlante » et à faire de l’écriture une voie de construction du « moi » et de re-naissance