Littérature et démonologie dans l’Espagne des XVe et XVIe siècles : vers l’émergence d’un genre nouveau ?

International audienceNicolas Diochon retrace les différentes étapes de la genèse du genre démonologique en Europe en s’arrêtant en particulier sur le cas espagnol. Avant de connaître sa période d’expansion et de renouveau au XVIe siècle, la littérature démonologique affleure avec force au XIVe siècle à la faveur de la grande crise morale et religieuse qui secoue l’Europe. Si la littérature démonologique avait adopté dans les premiers temps l’allure de textes normatifs, c’est progressivement la forme du traité qui s’impose coïncidant avec la période de pleine activité de l’Inquisition médiévale. Au XVIe en Espagne, les traités de démonologie sont rédigés en langue vernaculaire de telle sorte que leur lectorat s’élargit : le livre de Castañega (1529) s’adresse, par delà le clergé, à l’ensemble des fidèles tandis que celui de Ciruelo (1530), adressé aux juges séculiers et ecclésiastiques, propose une classification exhaustive des superstitions. L’originalité et la modernité des deux textes tient à ce qu’ils délaissent le latin pour le castillan et à ce qu’ils convient le lecteur à compléter, grâce à sa propre pratique, l’inventaire proposé. Dans son traité de 1599, Martín del Río qui s’adresse à toute la chrétienté et non plus aux seuls Espagnols, revient au latin afin de proposer une somme destinée à rassembler le point de vue des juristes, des théologiens et des philosophes en matière de démonologie. Son ouvrage intègre désormais les peines proposées pour chaque cas mais également un certain nombre d’anecdotes « abominables » qui flattent le goût du sensationnel de son lectorat. Une nouvelle tendance se dessine qui éloigne de leur visée théorique initiale les textes consacrés aux phénomènes surnaturels et à la sorcellerie