Johann Kirchinger, Der Bauernrebell. Des Leben des streitbaren Landtagsabgeordneten Franz Wieland, Ökonom in Hierlbach, Post Straubing. Ratisbonne, Pustet, 2010.

Note de lecture sur Johann Kirchinger, Der Bauernrebell. Des Leben des streitbaren Landtagsabgeordneten Franz Wieland, Ökonom in Hierlbach, Post Straubing. Ratisbonne, Pustet, 2010.Johann Kirchinger, Der Bauernrebell. Des Leben des streitbaren Landtagsabgeordneten Franz Wieland, Ökonom in Hierlbach, Post Straubing. Ratisbonne, Pustet, 2010. Un titre presque baroque pour un personnage baroque, démagogue enflammé et brutal, catholique anticlérical, libéral protectionniste, affirmant publiquement dans la même phrase qu'il aime Dieu, mais aussi son porte-monnaie. La vie de Franz Wieland (1850-1901), paysan riche et moderne (Ökonom !) de Basse-Bavière, l'un des principaux animateurs du parti « Ligue bavaroise des paysans » à la fin du XIX e siècle, permet de découvrir l'univers mental d'une région qui entre résolument dans la modernité technique et économique, sans y être vraiment préparée d'un point de vue politique et social. Le Centre (das Zentrum), parti catholique dominant sorti victorieux du Kulturkampf, mais décidé à jouer le jeu du patriotisme impérial et à contribuer à la paix sociale et au développement industriel de l'Empire des Hohenzollern, ainsi que l'aristocratie et la grande majorité des élites bavaroises sont violemment attaqués par les « dissidents » de la classe paysanne qui défendent en fait les intérêts des grands propriétaires terriens. Il s'agit de lutter contre tout ce qui contribue à augmenter les coûts de production, notamment la législation sociale, mise en place par Bismarck pour contrer l'expansion du parti social-démocrate, et la baisse des droits de douane, visant à favoriser les exportations de l'industrie allemande (déjà !). Les polémiques sont musclées de part et d'autre, les métaphores volent très bas. Franz Wieland, originaire de Gergweis dans la vallée de la Vils, affluent du Danube, avait commencé sa carrière en spéculant avec succès sur le prix des terrains agricoles, achetant de grands domaines pour les « saucissonner ». Une fois enrichi, il fit l'acquisition d'une grande propriété à Hierlbach, près de Straubing, et se spécialisa dans la culture de la pomme de terre. Son premier geste de protestation politique : une polémique violente contre le curé de Gergweis qui, au nom de l'égalité devant Dieu, avait abrogé le privilège réservé aux seuls paysans riches de passer par la sacristie pour entrer dans l'église du village. Wieland épouse une femme de son rang, engrossée avant le mariage, méthode sûre pour garantir cette alliance. Il traite valets et servantes avec mépris. Il sait mettre en oeuvre une démagogie anti-élitaire pour s'assurer le soutien des paysans moyens ou pauvres, fonde en 1893 un parti politique : la ligne des paysans de Basse Bavière, l'étend à toute la Bavière en 1895 et parvient à se faire élire en 1897 au parlement bavarois. Directement confronté alors aux élites, plus habiles que lui à tous égards, il échoue, après avoir proféré la provocation suprême : « Plutôt devenir Prussien que de crever Bavarois ! » Son influence est en recul, des compagnons le trahissent. Il meurt d'un cancer en 1901. On notera parmi ses adversaires politiques les plus résolus au sein même du mouvement paysan la présence d'un prêtre érudit, le docteur (en théologie) Georg Ratzinger, grand-oncle d'un pape aujourd'hui émérite. Un détail, qui est bien de l'époque : durant sa brève vie politique (six ou sept ans), Franz Wieland fut plutôt moins antisémite que ses adversaires de l'aristocratie ou de l'Église… Son parti, dont l'influence recula après 1919, fut dissous par le NSDAP en 1933. Johann Kirchinger a produit une étude historique bien écrite, précise, et qui en dit long sur l'univers mental d'une région profondément marquée par le conservatisme social et religieux au tournant du siècle. François GENTON