Invention or proclamation: Jewish identity in the stories of Bernard Malamud and Isaiah Spiegel

Comparer les nouvelles de l’auteur américain Bernard Malamud et celles de son contemporain polonais Isaiah Spiegel permettra d’examiner les différants processus de construction de judéité de leurs personnages. En effet, c’est en livrant des luttes de nature différente que les uns et les autres parviennent à cette fin commune : ceux de Malamud, auteur des années de l’après-guerre, se débattent pour reconstruire une judéité perdue ou construire une nouvelle identité tout court ; ceux de Spiegel, auteur qui, lui, composa ses œuvres dans le ghetto de Lodz durant les années de l’occupation nazi, se démènent pour maintenir le plein sens d’une judéité que les Allemands menaçaient d’avilissement et d’anéantissement. Immigrants débarqués en Amérique depuis peu ou enfants d’immigrants, les personnages de Malamud s'efforcent de choisir entre une tradition qui laisse à désirer, et la sécularisation, afin d’inventer ou réinventer une identité juive adéquate. En revanche, les personnages de Spiegel n’ont pas de choix à faire ; ils réaffirment leur identité juive à travers ce qui leur est enlevé : conscients à tout moment de qui ils sont, d’où ils viennent et de la communauté à laquelle ils appartiennent, ils manifestent un attachement tenace à la société organique à laquelle ils appartiennent, une affection obstinée à leur terre natale – ce que les personnages de Malamud ne sauraient faire. Car, en effet , les histoires de Malamud sont privées d’un élément contenu dans celles de Spiegel qui a voulu offrir une image précise de ce qu’avait été l’extermination des Juifs Polonais, et laisser un témoignage fidèle de leur lutte pour conserver leur identité et intégrité spirituelles : c’est le sens de territorialité qui, chez ce dernier, fait partie intégrante de la définition de la communauté. Ainsi, la distance qui sépare l’individu de ses racines, la situation de proximité entre celui-ci et la terre, ainsi que le sens qu’on attribue à la notion de communauté, sont les facteurs qui déterminent le besoin d’inventer une identité chez les uns, et le privilège d’en proclamer une chez les autres