Genre, modernisation soviétique et usage des « langues de religion » en Asie centrale (Ouzbékistan et Tadjikistan)

In a secularizing context, the relationship between gender, Soviet modernization and uses of « languages of religion » (Arabic, Persian and Tchaghatay Turkish) is explored. The main focus is the role of Muslim women in the trans-generational transmission of religion. Women of religion are the ones who mediate the rediscovery of the Muslim heritage. This rediscovery is taking place within the broader context of re-Islamization and revalorization of national languages of Uzbekistan (Uzbek with Latin script) and Tadjikistan (Tadjik with Cyrillic script) ; both independent states were formerly part of the Soviet Union. The author retraces the main axes of the modernization politics through two main domains: linguistic policies and the emancipation of Muslim women. The paper focuses on the old and new Muslim educational systems in these two newly independent Central Asian states and highlights these counstries’ tendency, due to their fight against Islamism, to refuse all religious change. This means all religious trends are rejected, even those that would enable the regions’s Muslim societies to leave behind their traditional orientation.Dans le cadre d’une réflexion sur le rôle des femmes dans la transmission intergénérationnelle de la religion dans une situation de sécularisation, l’article aborde les relations entre genre, modernisation soviétique et usage de « langues de religion » (arabe, persan, turc tchaghatay). Il montre comment, dans le contexte de réislamisation et de revalorisation des langues nationales de l’Ouzbékistan (ouzbek latinisé) et du Tadjikistan (tadjik cyrillisé), pays indépendants issus de l’ex-URSS, le rapport au religieux des musulmanes se porte vers la re-découverte d’un patrimoine islamique véhiculé par des femmes de religion. Tout en retraçant les grands axes de la politique de modernisation de l’Asie centrale entreprise par le pouvoir soviétique à travers son volet linguistique et celui lié à l’émancipation de la femme, l’auteur rend compte des processus de dé-islamisation et de dé-soviétisation des sociétés musulmanes centre-asiatiques. Elle s’attache plus particulièrement à l’enjeu des systèmes éducatifs islamiques ancien et nouveau dans ces pays d’Asie centrale qui, en raison de leur lutte contre l’islamisme, tendent à verrouiller toute possibilité d’évolution religieuse permettant aux sociétés musulmanes de la région de « sortir » de leur orientation traditionaliste