Ce que la géographie fait au(x) monde(s)

Pour être pertinente, la question « À quoi sert la géographie ? » nécessite d’être reformulée. Plutôt que d’interroger son utilité, il convient en effet de demander ce que sert cette discipline et qui elle sert. Une telle approche permet d’étudier ce que fait la géographie en servant des opérateurs sociaux : comment cet ensemble de savoirs et de compétences qu’on nomme la géographie, mobilisé par des acteurs, construit-il des réalités sociales ? Cet article est donc une invitation à explorer la dimension spatiale des sociétés : l’espace ne doit plus être considéré comme le seul support de l’action, mais comme un acteur à part entière. Ce rôle de l’espace est envisagé à partir de situations très localisées (qui vont des manuels de savoir-vivre jusqu’à la gestion des épidémies, en passant par les règles d’usage des téléphones portables dans les TGV), qui mettent toutes en jeu cette dimension spatiale qui constitue le point aveugle de nos sociétés.The question “What’s the use of geography” should be reformulated in order to gain relevance. Rather than raising the question of geography’s usefulness, we should ask what purposes it serves and who it serves. This approach enables us to study what geography does when serving different social operators : how can this corpus of knowledge and skills that we call geography, when used by certain agents, build social realities ? This paper is an invitation to explore the spatial dimension of societies : space is no longer seen as the only basis for action, but as a role-playing agent in itself. Space’s role is considered in localized situations (ranging from good manners manuals, rules about how to use mobile phones in trains to the management of epidemics), which make this spatial dimension come into play